Le topi côtier (Damaliscus lunatus topi) est une sous-espèce du topi (Damaliscus lunatus), une antilopegrégaire des plaines africaines. Bien que faisant partie du complexe Damaliscus lunatus, le statut taxonomique précis et les menaces spécifiques pesant sur cette sous-espèce nécessitent une attention continue en matière de conservation.
Morphologiquement, le topi côtier se distingue par une silhouette élancée, une robe brun rougeâtre foncé avec un éclat cuivré moins intense que chez le topi de l'Est, et des marquages noirs étendus sur le visage, les jambes et les flancs. Le pelage est parfois plus terne, probablement en raison des conditions écologiques plus arides de son aire de répartition.
Les cornes, portées par les deux sexes, sont fortement annelées, en forme de lyre, plus courtes en moyenne que celles du korrigum. Les mâles adultes pèsent en moyenne entre 130 et 150 kg, tandis que les femelles sont légèrement plus légères. Sa morphologie, bien que proche de celle des autres topis, tend vers un profil intermédiaire entre les formes de l’ouest et celles de l’est.
Damaliscus lunatus topi Auteur: Simon Tonge CC0 (Domaine public)
HABITAT
La répartition du topi côtier est distincte de celle des autres sous-espèces et se limite au sud-est du Kenya et aux régions adjacentes de la Somalie. En Somalie, on le trouvait autrefois dans les prairies riveraines du cours inférieur des fleuves Shebelle et Juba, et au Kenya dans les districts de Lamu, Garissa et Tana, bien que récemment signalé uniquement à Lamu et Tana. Aucune information récente n'est disponible pour la Somalie.
Le topi côtier habite généralement les plaines inondables et autres prairies d'Afrique de l'Est. En Somalie, ce bovidé était autrefois présent localement dans le sud, dans les prairies riveraines des cours inférieurs du Shebelle et du Juba, ainsi que dans la région du lac Badana.
L’alimentation du Topi côtier repose presque exclusivement sur les graminées. Il sélectionne les jeunes pousses vertes de manière très efficace, surtout après les pluies ou les incendies naturels. Parmi les herbes les plus consommées figurent Hyparrhenia, Sporobolus et Chloris. En saison sèche, il peut parcourir de longues distances à la recherche de ressources, mais il reste fidèle aux pâturages saisonniers de haute qualité. Il boit régulièrement, bien qu’il puisse résister temporairement à la sécheresse grâce à l’eau contenue dans la végétation.
La reproduction est saisonnière, centrée autour du début de la saison des pluies. La gestation dure en moyenne 7,5 mois, et les naissances sont synchronisées pour coïncider avec l’abondance de nourriture. Les femelles donnent naissance à un seul petit, qui reste dissimulé quelques jours dans la végétation avant de rejoindre le troupeau. La croissance rapide du jeune lui permet de suivre sa mère très tôt et de réduire le risque de prédation.
Cette sous-espèce est grégaire, et les groupes peuvent atteindre plusieurs dizaines d’individus. Les femelles vivent en troupeaux accompagnés de leurs jeunes, tandis que les mâles peuvent adopter un comportement territorial très marqué en saison de reproduction. Comme les autres topis, les topis côtiers mâles établissent des leks, c’est-à-dire de petites zones de parade où ils défendent un micro-territoire pour attirer les femelles. Ils s’y tiennent debout, immobiles, ou bien se livrent à des poursuites symboliques, dans une compétition plus visuelle que physique. Ce comportement, typique des Damaliscus, est particulièrement développé chez cette sous-espèce dans les vastes plaines de son aire de répartition.
Les prédateurs naturels du topi côtier sont similaires à ceux des autres sous-espèces de topi et des antilopes de taille moyenne dans leur aire de répartition côtière de l'Afrique de l'Est. Ils comprennent principalement :
* Lions : Prédateurs dominants, les lions (Panthera leo) sont capables de s'attaquer aux adultes.
* Léopards : Les léopards (Panthera pardus) chassent les topis de tous âges, avec une préférence pour les jeunes et les individus plus faibles.
* Guépards : Les guépards (Acinonyx jubatus) sont des animaux rapides en course. Leur vitesse leur permet de capturer les topis, en particulier les jeunes en terrain découvert.
* Hyènes tachetées : Les hyènes tachetées (Crocuta crocuta) peuvent s'attaquer aux adultes en groupe et sont des prédateurs importants des jeunes.
* Lycaons : Les lycaons (Lycaon pictus) sont des chasseurs sociaux qui opèrent en meute organisée. Bien que ces canidés soient aujourd’hui rares dans plusieurs régions de l’aire de répartition, ils représentent toujours une menace non-négligeable pour les topis.
* Chacals : Les chacals (Canis spp.) sont principalement une menace pour les très jeunes topis (nouveau-nés).
* Python : Les pythons de Seba (Python sebae) sont des prédateurs occasionnels qui peuvent s'attaquer aux jeunes topis.
* Crocodiles : Dans les secteurs où leur habitat chevauche les points d'eau, les crocodiles du Nil (Crocodylus niloticus) peuvent représenter une menace pour les topis venant boire ou traverser des rivières.
Comme les autres topis, le topi côtier compte sur sa vitesse, son agilité, sa bonne vue et son ouïe pour échapper aux prédateurs. Ils vivent en groupes, ce qui offre une vigilance collective et rend la capture plus difficile pour les ennemis solitaires. Les zones ouvertes avec une végétation basse sont privilégiées car elles permettent de détecter les dangers à distance.
Les principales menaces qui pèsent sur le topi en général, et notamment sur la sous-espèce topi côtier, sont le développement agro-pastoral et la chasse excessive. Le nombre de moutons et de chèvres dans les deux comtés où cette sous-espèce est présente a augmenté de 55 % entre 1995 et 2013. Le développement dans la zone côtière du Kenya se développe rapidement et les grands projets d'infrastructure, en particulier le corridor de transport entre le port de Lamu, le Soudan du Sud et l'Éthiopie (LAPSSET), devraient avoir un impact majeur sur la basse vallée de la Tana, une fois mis en oeuvre. Les opérations de contre-insurrection à la frontière entre le Kenya et la Somalie depuis 2013 et la présence de groupes lourdement armés dans le sud-ouest de la Somalie sur une période beaucoup plus longue sont également susceptibles d'avoir eu un effet négatif sur le topi côtier.
CONSERVATION
Le topi côtier est actuellement considéré comme menacé. Il est inscrit dans la catégorie "En danger" (EN) sur la Liste rouge de l'IUCN. Les Topi côtiers se rencontrent principalement en dehors des zones protégées, bien qu'ils soient présents dans les réserves nationales de Boni et de Dodori
TAXONOMIE
L'histoire taxonomique du topi côtier suit un chemin similaire à celui des autres sous-espèces de Damaliscus lunatus, avec des périodes de reconnaissance comme espèce distincte suivies d'une classification comme sous-espèce, et des débats ultérieurs sur son statut. Voici les étapes clés :
Le topi a été initialement décrit comme une espèce distincte, Damaliscus lunatus, par le zoologiste irlandais William Ogilby en 1836. Sa description était basée sur des spécimens provenant de la région côtière de l'Afrique de l'Est.
En 1914, le zoologiste britannique Gilbert Blaine a révisé la classification de plusieurs ongulés africains dans sa publication "Notes on the Races of Some South and East African Ungulates". Dans ce travail, il a désigné le topi côtier comme une sous-espèce de Damaliscus lunatus, établissant ainsi le nom scientifique Damaliscus lunatus topi. Blaine a basé cette classification sur des différences morphologiques et géographiques par rapport aux autres formes de topis.
Suite à la désignation de Blaine, Damaliscus lunatus topi a été largement accepté comme une sous-espèce. Cependant, au fil du temps, des études morphologiques, écologiques et génétiques ont continué à explorer les relations au sein du complexe Damaliscus lunatus. Ces recherches ont parfois remis en question la classification traditionnelle et ont conduit à des propositions de divisions taxonomiques plus fines.
La proposition de Fenton Cotterill (2003) de diviser Damaliscus lunatus en deux espèces (Damaliscus lunatus pour les populations du sud et Damaliscus korrigum pour les populations du nord et de l'est) aurait potentiellement inclus le topi côtier sous Damaliscus korrigum topi. D'autres classifications ont également été suggérées, reflétant la complexité des relations évolutives au sein de ce groupe d'antilopes.
La classification la plus couramment acceptée aujourd'hui par les principales bases de données taxonomiques (comme le GBIF et l'IUCN) est Damaliscus lunatus topi, reconnaissant le travail de Blaine en 1914 en le désignant comme une sous-espèce de Damaliscus lunatus, tout en reconnaissant la description originale de l'espèce par Ogilby. Aujourd'hui, le topi est considéré comme une espèce polytypique avec plusieurs sous-espèces reconnues :
Ogilby, W. (1836). New species of Antelope from the Gambia. Proceedings of the Zoological Society of London, 1836, 43-45.
Ogilby, W. (1836). Proceedings of the Zoological Society of London, 1836, 135-137.
Blaine, G. (1914). Notes on the Races of Some South and East African Ungulates. Proceedings of the Zoological Society of London, 84(1), 231-260.
Newby, J.E. (1974). Ecological studies of the tiang and topi in Sudan. Wildlife Conservation Reports.
IUCN SSC Antelope Specialist Group (2017). Damaliscus lunatus.
East, R. (1999). African Antelope Database 1998. IUCN.
Kingdon, J. (1997). The Kingdon Pocket Guide to African Mammals. Academic Press.
Allen, G. M. (1939). A checklist of African mammals. Bulletin of the Museum of Comparative Zoology at Harvard College, 83.
Ansell, W. F. H. (1972). Part 15: Artiodactyla. In J. Meester & H. W. Setzer (Eds.), The mammals of Africa: An identification manual (pp. 1-84). Smithsonian Institution Press.
Haltenorth, T., & Diller, H. (1980). A field guide to the mammals of Africa including Madagascar. Collins.
Groves, C. P., & Grubb, P. (2011). Ungulate taxonomy. Johns Hopkins University Press.
Kingdon, J., Hoffmann, M., & Pillay, N. (Eds.). (2013). Mammals of Africa (Vols. 1-6). Bloomsbury Publishing.
Cotterill, F. D. P. (2003). Insights into the1 taxonomy of tsessebe antelopes,2 Damaliscus lunatus (Bovidae: Alcelaphini) in south-central Africa: with the description of a new evolutionary species. Durban Museum Novitates, 28, 1-30.