Tsessebe de Bangweulu (Damaliscus lunatus superstes)
Tsessebe de Bangweulu (Damaliscus lunatus superstes)
Le tsessebe de Bangweulu (Damaliscus lunatus superstes) est une sous-espèce rare et distincte de topi (Damaliscus lunatus) endémique des plaines inondables et des zones adjacentes du lac Bangweulu en Zambie. Découvert et décrit relativement récemment, son histoire taxonomique est étroitement liée aux débats sur la classification du complexe Damaliscus lunatus. Initialement considéré comme faisant partie du sassabi, des études morphologiques et génétiques ont justifié sa reconnaissance comme une sous-espèce distincte, voire potentiellement une espèce à part entière.
Le tsessebe de Bangweulu est de taille modeste comparé aux autres topis, mais il présente une silhouette compacte et vigoureuse. Son pelage est d’un brun chaud, tendant vers des tons fauves ou roussâtres, moins éclatant que celui des formes orientales comme le topi de l'Est. Les marquages noirs sont généralement discrets, localisés sur les membres et autour du museau, mais leur intensité varie considérablement selon les individus.
Les cornes sont bien développées, en forme de lyre, mais elles sont légèrement plus courtes et plus robustes que chez le korrigum ou le tiang. Les adultes atteignent un poids moyen de 110 à 135 kg, les mâles étant sensiblement plus lourds que les femelles. Leur conformation musculaire bien adaptée à la course rapide témoigne de leur stratégie antiprédatrice.
Le tsessebe de Bangweulu est présents dans les plaines de Bangweulu, au nord-est de la Zambie, et est aujourd'hui éteint dans le pédicule du Katanga, en République démocratique du Congo. La population actuelle est estimée à 3 500 individus et est en augmentation grâce aux animaux introduits dans des terres privées de la Zambie.
Ce bovidé occupe les plaines inondables herbeuses du sud de Bangweulu, une vaste zone humide composée de plaines inondables herbeuses et de marécages. Son habitat s'étend d'une plaine herbeuse peu profonde, inondée seulement deux mois, à des chenaux profonds et permanents.
Le régime alimentaire du tsessebe de Bangweulu repose principalement sur les graminées à croissance rapide des genres Themeda, Digitaria et Chloris. Il sélectionne avec précision les jeunes pousses riches en protéines et ajuste ses déplacements en fonction de la régénération post-incendie. L’animal est partiellement dépendant de l’eau, bien qu’il puisse subsister temporairement sans accès direct à des sources permanentes. En saison sèche, il adopte une activité plus nocturne ou crépusculaire pour limiter la perte d’eau.
La reproduction est saisonnière, et la mise bas a lieu en début de saison des pluies, lorsque les ressources sont abondantes. Après une gestation d’environ 7,5 mois, les femelles mettent bas un seul petit dans un site discret, souvent caché dans les hautes herbes. Le nouveau-né, après une courte période de cache, rejoint rapidement le groupe et commence à suivre sa mère.
Le tsessebe de Bangweulu est une espèce sociale, formant de petits groupes composés de femelles adultes, de leurs petits, et parfois d’un ou deux mâles. La taille des groupes semble inférieure à celle observée chez les autres sous-espèces, ce qui s’explique probablement par la faible densité de population. Les mâles adultes développent un comportement territorial pendant la saison de reproduction, mais les leks sont rares ou absents, et le système de reproduction semble plus dispersé. Les combats entre mâles sont limités à des démonstrations de force, car les effectifs réduits favorisent une hiérarchie fluide plutôt que des confrontations brutales.
Les prédateurs du tsessebe de Bangweulu incluent le lion, le léopard et la hyène tachetée, bien que la pression de prédation semble modérée en raison de la densité relativement faible de grands carnivores dans certaines zones du parc.
MENACES
Les principales menaces pesant sur le topi en général, y compris le tsessebe de Bangweulu, sont le développement agropastoral et la chasse excessive. Ce bovidé est totalement dépendant du maintien d'un régime hydrologique favorable; par conséquent, les prélèvements d'eau, la sécheresse, le drainage ou la construction de barrages pourraient rapidement avoir un impact sur cette sous-espèce.
CONSERVATION
Le tsessebe de Bangweulu est actuellement considéré comme menacé. Il est inscrit dans la catégorie "Vulnérable" (VU) sur la Liste rouge de l'IUCN.
Le tsessebe de Bangweulu est présent à Bangweulu et a été transféré dans plusieurs ranchs privés de Zambie. La faisabilité de sa réintroduction dans un habitat adapté (notamment les plaines de Kalungu) le long du Haut Chambeshi devrait être évaluée.
L'histoire taxonomique du tsessebe de Bangweulu est relativement récente et étroitement liée à la réévaluation du complexe Damaliscus lunatus. Contrairement aux autres sous-espèces plus anciennement reconnues, son individualité taxonomique a été établie plus tardivement.
Pendant longtemps, les populations de la région du lac Bangweulu en Zambie étaient considérées comme faisant partie du sassabi (Damaliscus lunatus lunatus.). Les premières classifications ne distinguaient pas cette population comme étant unique. Des études ultérieures, notamment celles menées par Fenton Cotterill au début des années 2000, ont mis en évidence des différences morphologiques et écologiques distinctes chez les tsessebes de Bangweulu par rapport aux populations plus au sud. Ces observations suggéraient une divergence significative.
En 2003, Fenton Cotterill a formellement décrit le Tsessebe de Bangweulu comme une nouvelle sous-espèce, Damaliscus lunatus superstes, dans sa publication "Insights into the taxonomy of tsessebe antelopes, Damaliscus lunatus (Bovidae: Alcelaphini) in south-central Africa: with the description of a new evolutionary species". Le nom "superstes" signifie "survivant" en latin, soulignant son statut potentiellement relique et sa survie dans cet écosystème spécifique.
La description de Damaliscus lunatus superstes a contribué au débat plus large sur la taxonomie du complexe Damaliscus lunatus. Cotterill lui-même a plaidé pour une division du complexe en reconnaissant Damaliscus lunatus (sens strict) pour les populations de sassabis du sud et une espèce distincte, Damaliscus korrigum, pour les topis de l'Est, topis côtiers, tiangs et korrigums. Dans ce contexte, Cotterill a également suggéré que Damaliscus lunatus superstes pourrait même représenter une espèce distincte en raison de son isolement géographique, de ses caractéristiques morphologiques uniques et potentiellement de sa distinctivité génétique (bien que des études génétiques spécifiques aient pu être menées ultérieurement pour étayer cette hypothèse).
Actuellement, le tsessebe de Bangweulu est généralement reconnu comme une sous-espèce distincte de topi par des autorités comme l'IUCN et certaines bases de données taxonomiques. Cependant, la possibilité qu'il représente une espèce à part entière continue d'être discutée dans la littérature scientifique, en attendant des études génétiques plus approfondies et un consensus plus large au sein de la communauté scientifique.
IUCN SSC Antelope Specialist Group (2017). Damaliscus lunatus (incl. superstes).
Stuart, C. & Stuart, T. (2015). Stuart’s African Mammals: A Pocket Guide. Struik Nature.
Cotterill, F. D. P. (2003). Insights into the taxonomy of tsessebe antelopes, Damaliscus lunatus (Bovidae: Alcelaphini) in south-central Africa: with the description of a new evolutionary species.1 Durban Museum Novitates, 28,2 1-30.
Groves, C. P., & Grubb, P. (2011). Ungulate taxonomy. Johns Hopkins University Press.
Kingdon, J., Hoffmann, M., & Pillay, N. (Eds.). (2013). Mammals of Africa (Vols. 1-6). Bloomsbury Publishing.