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Loup rouge de Gregory (Canis lupus gregoryi)


Le loup rouge de Gregory (Canis rufus gregoryi) représente la seule sous-espèce survivante du loup rouge (Canis rufus), une espèce de canidé emblématique de l'Amérique du Nord. Cette sous-espèce, autrefois répandue dans le bassin inférieur du fleuve Mississippi, a malheureusement subi un déclin drastique au cours du XXe siècle, conduisant à sa disparition à l'état sauvage en 1980. Grâce à des efforts de conservation intensifs, incluant des programmes d'élevage en captivité et de réintroduction, quelques populations ont été rétablies, principalement en Caroline du Nord. Le statut taxonomique du loup rouge a été l'objet de nombreux débats scientifiques, alternant entre la reconnaissance comme espèce distincte, sous-espèce du loup gris, ou même hybride. Malgré ces controverses, le loup rouge de Gregory reste une entité de conservation cruciale, symbolisant la fragilité de la biodiversité face aux pressions anthropiques et les défis complexes de sa gestion.


Loup rouge de Gregor (Canis rufus gregoryi)
Loup rouge de Gregor (Canis rufus gregoryi)
Auteur: Steve Hillebrand/USFWS - Wikimedia Commons
CC-BY (Certains droits réservés)



DESCRIPTION

La morphologie du loup rouge de Gregory se caractérise par une taille intermédiaire entre celle du coyote (Canis latrans) et du loup gris (Canis lupus). En moyenne, un adulte mesure entre 95 cm et 1,20 m de long et pèse entre 20 et 35 kg, ce qui le rend plus svelte et moins imposant que le loup gris, mais plus grand que le coyote.

Son pelage présente une teinte dominante de roux cannelle, souvent nuancée de noir ou de gris sur le dos, lui conférant une apparence distincte qui justifie son nom commun. Le museau et les oreilles sont généralement de couleur fauve, tandis que le dessous du museau est blanc. Une particularité notable est la teinte souvent plus sombre de l'arrière de son corps et la pointe noire de sa queue touffue.

Au-delà de sa coloration, des différences structurelles permettent de le distinguer du loup gris : il possède une tête et un crâne plus petits, des oreilles proportionnellement plus longues et des pattes plus fines et plus allongées. Une autre caractéristique saisonnière est sa mue annuelle, qui a lieu en été. Ces traits morphologiques, en particulier la taille et la coloration, ont joué un rôle clé dans les discussions sur son classement taxonomique.


HABITAT

La répartition actuelle du loup rouge de Gregory est malheureusement extrêmement limitée et est le résultat d'efforts de conservation intensifs. Déclaré éteint à l'état sauvage en 1980, le loup rouge a été le sujet d'un programme de reproduction en captivité qui a permis sa réintroduction. Aujourd'hui, la seule population sauvage existante se trouve principalement dans l'est de la Caroline du Nord, notamment au sein du Alligator River National Wildlife Refuge et des zones adjacentes.

Cet habitat actuel est caractérisé par des marécages inaccessibles, des zones humides côtières, des forêts mixtes et des zones forestières résiduelles qui offrent un refuge suffisant et des proies pour cette petite population. Des efforts de gestion sont mis en oeuvre pour agrandir cette zone de réintroduction, mais la densité humaine et les conflits potentiels avec les éleveurs limitent les possibilités d'expansion. En dehors de cette zone de réintroduction, quelques spécimens sont également maintenus en captivité dans diverses installations aux États-Unis et au Canada, formant une "assurance" génétique pour l'espèce. Le choix de ces habitats de réintroduction est stratégique, privilégiant les zones avec une faible densité humaine et une abondance de proies, mais le défi persistant de l'hybridation avec les coyotes et la perte de diversité génétique demeurent des menaces majeures pour l'expansion de sa répartition actuelle.


ÉCOLOGIE

L'écologie du loup rouge de Gregory est intrinsèquement liée à son rôle de prédateur dans les écosystèmes du sud-est des États-Unis. Son régime alimentaire est principalement composé de mammifères de taille moyenne et petite. Il se nourrit fréquemment de lapins aquatiques, de lapins à queue blanche, de lapins des marais, les ragondins, les rats musqués et les ratons laveurs. Les cerfs constituent également une part importante de son alimentation, en particulier les faons. Opportuniste, il ne dédaigne pas les charognes lorsque l'occasion se présente.

En termes de comportement social, le loup rouge de Gregory est généralement monogame et vit en couple, souvent accompagné de sa progéniture des années précédentes. Ces unités familiales patrouillent des territoires d'environ 50 km², qu'elles marquent à l'aide d'urine et d'excréments pour délimiter leur domaine vital et communiquer avec d'autres canidés. Ils adoptent un mode de chasse itinérant, exploitant de petites parcelles pendant plusieurs jours avant de se déplacer. L'activité de ces loups est principalement crépusculaire, avec des pics d'activité à l'aube et au crépuscule. Les tanières, essentielles pour la mise bas et l'élevage des louveteaux, sont creusées dans le sol, souvent près des cours d'eau ou dans les creux de grands arbres, ou encore dans des environnements modifiés par l'homme comme les ponceaux. Leur communication est complexe, combinant hurlements, langage corporel, signaux tactiles et chimiques (phéromones), tous essentiels pour le maintien des liens sociaux et la régulation du statut reproducteur.


STATUT

Le statut de conservation du loup rouge de Gregory, en tant que seule sous-espèce vivante du loup rouge (Canis rufus), est extrêmement préoccupant. L'Union Internationale pour la Conservation de la Nature (IUCN) classe l'espèce Canis rufus comme "En Danger Critique" (CR) sur sa Liste rouge des espèces menacées. Cette classification reflète un déclin dramatique de ses populations, principalement dû à la persécution humaine, à la destruction de son habitat naturel et à l'hybridation avec les coyotes.

Historiquement, le loup rouge de Gregory a été déclaré éteint à l'état sauvage en 1980. Cependant, grâce à un programme de reproduction en captivité initié en 1969 et à des efforts de réintroduction débutés en 1987, une petite population sauvage a pu être rétablie, principalement dans l'est de la Caroline du Nord. Malgré ces efforts, la population sauvage demeure très faible, avec des estimations fluctuant entre une quinzaine et une vingtaine d'individus à l'état sauvage en 2023. Le programme de conservation en captivité est vital et abrite environ 200 loups rouges répartis dans plusieurs installations aux États-Unis, constituant une sauvegarde génétique essentielle pour l'espèce. Les principales menaces actuelles incluent la perte de diversité génétique due à l'endogamie et surtout l'hybridation continue avec les coyotes, qui peut compromettre l'intégrité génétique de la sous-espèce. Des stratégies de gestion actives sont mises en oeuvre, comme la stérilisation de coyotes dans les zones de réintroduction pour éviter la formation de couples hybrides et maintenir l'occupation des territoires par des canidés non reproducteurs.


TAXONOMIE

L'histoire taxonomique du loup rouge, et par extension de sa sous-espèce Canis rufus gregoryi, est l'une des plus controversées et complexes parmi les grands carnivores d'Amérique du Nord, ayant fait l'objet de débats intenses pendant des décennies. Initialement décrit par Audubon et Bachman en 1851 sous le nom de Canis rufus, le loup rouge fut rapidement l'objet de classifications divergentes. La principale question était de savoir s'il s'agissait d'une espèce distincte, d'une sous-espèce du loup gris, ou même d'un hybride entre le loup gris et le coyote.

Au début du XXe siècle, des analyses morphométriques de crânes et de dents ont été menées pour tenter de clarifier sa position. Edward A. Goldman, un zoologiste américain, a joué un rôle clé en 1937 en reconnaissant trois sous-espèces de Canis rufus, dont Canis rufus gregoryi. Cette sous-espèce était alors identifiée dans le bassin inférieur du Mississippi, couvrant des régions du Missouri, de l'Arkansas, de l'Oklahoma, de l'est du Texas et de la Louisiane. Les deux autres sous-espèces, Canis rufus floridanus (loup rouge de Floride) et Canis rufus rufus (loup rouge du Texas), sont aujourd'hui éteintes.

Cependant, dans les années 1970 et 1980, l'avènement des analyses génétiques a relancé le débat. Certaines études basées sur l'ADN mitochondrial ont suggéré que le loup rouge pourrait être un hybride relativement récent entre le loup gris et le coyote, ou une lignée distincte mais très proche du coyote. D'autres recherches génétiques ont soutenu l'idée d'une espèce distincte, voire d'un descendant d'un loup plus ancien et de taille plus petite, ayant évolué indépendamment en Amérique du Nord. La découverte d'un allèle génétique unique au loup rouge en 1980 fut un argument moléculaire majeur en faveur de sa reconnaissance en tant qu'espèce à part entière.

Le Groupe de Spécialistes des Canidés de l'IUCN a maintenu Canis rufus comme une espèce distincte en danger critique, reconnaissant sa valeur en matière de conservation malgré les incertitudes taxonomiques. Le gouvernement fédéral des États-Unis, par l'intermédiaire de l'U.S. Fish and Wildlife Service (USFWS), reconnaît également Canis rufus comme une espèce distincte et la protège en vertu de l'Endangered Species Act. Les recherches continuent d'explorer les relations phylogénétiques exactes du loup rouge de Gregory, mais les efforts de conservation se concentrent sur la sauvegarde de cette population génétiquement unique face à la menace de l'extinction.


CLASSIFICATION


Fiche d'identité
Nom communLoup rouge de Gregory
Autre nomLoup de Gregory
English nameGregory's wolf
Gregor's red wolf
RègneAnimalia
EmbranchementChordata
Sous-embranchementVertebrata
ClasseMammalia
Sous-classeTheria
Infra-classeEutheria
OrdreCarnivora
Sous-ordreCaniformia
FamilleCanidae
GenreCanis
EspèceCanis rufus
Nom binominalCanis rufus gregoryi
Décrit parEdward Alphonso Goldman
Date1937

SOURCES

* Liens internes

Liste Rouge IUCN des espèces menacées

Mammal Species of the World (MSW)

Système d'information taxonomique intégré (ITIS)

U.S. Fish and Wildlife Service

* Liens externes

Global Biodiversity Information Facility (GBIF)

International Wolf Center

Wikimedia Commons

* Bibliographie

Nowak, R. M. (2002). "The original status of wolves in eastern North America." Southeastern Naturalist, 1(2), 95-130.

Nowak, R. M. (2003). "Wolf evolution and taxonomy." In Wolves: Behavior, Ecology, and Conservation (pp. 239-271). University of Chicago Press

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Paradiso, J. L., & Nowak, R. M. (1972). Canis rufus. Mammalian Species, 22, 1-4.

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Mech, L. D., & Boitani, L. (Eds.). (2003). Wolves: Behavior, Ecology, and Conservation. University of Chicago Press.

Audubon, J. J., & Bachman, J. (1851). The Viviparous Quadrupeds of North America. Volume II.

Goldman, E. A. (1937). "The Wolves of North America." Journal of Mammalogy, 18(1), 37-45.