Céphalophe d'Abbott (Cephalophus spadix)

Le céphalophe d'Abbott (Cephalophus spadix) est une antilope appartenant à la famille des bovidés. Espèce rare, ce céphalophe fut photographié pour la première fois en 2003. Ce mammifère discret est endémique des zones montagneuses du sud-est de la Tanzanie.

DESCRIPTION

Le céphalophe d'Abbott est un petit ongulé qui se distingue par une apparence robuste et compacte, adaptée à son environnement forestier dense. Il mesure entre 70 et 100 cm de long, environ 40 à 60 cm de hauteur au garrot pour un poids moyen de 20 à 25 kg.

Le pelage est généralement brun foncé à noirâtre, ce qui lui permet de se camoufler efficacement dans les sous-bois ombragés. Les poils sont courts et denses, adaptés au climat frais et humide des montagnes. Il n'y a pas de marques faciales visibles, mais la lèvre supérieure est blanchâtre et le front brun foncé. Une crête touffue distinctive de longs poils pousse au sommet de la tête entre les oreilles dont la couleur varie du brun pâle au châtain foncé, mais est généralement rougeâtre.

Les deux sexes possèdent de petites cornes droites, mesurant entre 5 et 10 cm de long. Les cornes sont souvent légèrement incurvées vers l’arrière et servent principalement à la défense et à la compétition intraspécifique.

La tête est relativement petite et élancée. Les yeux sont grands, adaptés à la vision dans des conditions de faible luminosité, typiques des forêts épaisses. Un museau allongé et mobile facilite la recherche de nourriture au sol. Les pattes sont courtes mais musclées, idéales pour se déplacer rapidement et silencieusement à travers la végétation dense. Les sabots sont fins et pointus, offrant une bonne adhérence sur les terrains escarpés et glissants.

HABITAT

Endémique de Tanzanie, où on le trouve dans plusieurs forêts de montagne et sous-montagne au nord, à l'est et au sud-ouest. Le céphalophe d'Abbott est actuellement présent au mont Kilimandjaro, dans les montagnes occidentales d'Usambara, de Rubeho et d'Udzungwa, au mont Rungwe, dans les forêts des hautes terres du sud. Des études récentes ont confirmé sa présence dans neuf forêts distinctes d'Udzungwa, mais n'ont pas permis de les trouver à Madehani.

Dans l'arc oriental, il a probablement disparu des monts Uluguru et d'Usambara oriental. Son statut dans d'autres forêts de l'arc oriental est inconnu, cependant, des études récentes n'ont pas permis de détecter sa présence dans les monts North Pare, South Nguru et Uluguru. Il existe d'anciens relevés dans les forêts d'escarpement de l'est du district de Njombe, mais le statut de ces forêts est incertain et fait l'objet d'une enquête. Wilson (2001) a noté que le céphalophe d'Abbott était toujours présent dans les monts Poroto en 1958, mais le statut de cette population est également incertain. Une petite population est toujours présente sur le mont Rungwe et la forêt de Livingstone dans le nouveau parc national de Kitulo. Elle a également été signalée auparavant dans des parcelles forestières le long du sommet du rift Gregory entre Babati et Mbulu. Les monts Udzungwa et le mont Kilimandjaro pourraient abriter les deux seules populations viables.

On le trouve à l'intérieur et dans les clairières des forêts matures de montagne et de sous-montagne. Sur le mont Kilimandjaro, ce céphalophe est le plus commun entre 1 300 et 2 700 m. Dans les monts Udzungwa, le céphalophe d'Abbott a été observé à une altitude aussi basse que 300 m dans la forêt de Matundu, une grande forêt de plaine et semi-décidue, ainsi que sur le plus haut sommet (mont Luhombero, 2 600 m). On le trouve dans les forêts de montagne perturbées et secondaires et dans les forêts de bambous jusqu'à 2 500 m et occasionnellement dans les prairies de plateau jusqu'à 2 800 m sur le mont Rungwe et à Livingstone-Kitulo dans les hautes terres du sud.

BIOLOGIE

Le céphalophe d’Abbott est un herbivore opportuniste qui se nourrit principalement de végétation disponible dans son habitat forestier. Les fruits tombés des arbres constituent une grande partie de son alimentation. Il préfère les fruits mûrs et sucrés. Il consomme également des feuilles tendres, des pousses et des bourgeons. Dans les zones où la végétation est plus ouverte, il peut se nourrir d’herbes et de graminées. Pendant la saison des pluies, il se nourrit parfois de champignons, une source précieuse de nutriments. Le céphalophe d’Abbott est principalement un navigateur, ce qui signifie qu’il prélève sa nourriture à des niveaux relativement bas, au sol ou sur les arbustes. Son museau mobile et sa langue préhensile lui permettent de manipuler des morceaux de végétation avec précision. L’eau est principalement obtenue par la consommation de fruits et de végétation humide. Cependant, il s’abreuve également directement dans les rivières ou les mares lorsqu’elles sont accessibles.

Le céphalophe d’Abbott est un animal solitaire, et les interactions entre mâles et femelles se limitent généralement à la période de reproduction. Les femelles n’ont pas de saison de reproduction clairement définie, bien que les naissances aient tendance à se concentrer à la fin de la saison des pluies, lorsque la nourriture est abondante. Les mâles émettent des signaux olfactifs et vocaux pour attirer les femelles. Les combats entre mâles sont rares mais peuvent survenir. Ces affrontements impliquent généralement des charges et des coups de cornes. La gestation dure environ 6 à 7 mois. Une seule progéniture est mise bas par portée, bien que des naissances gémellaires soient occasionnellement observées. Le nouveau-né pèse environ 2 à 3 kg à la naissance. Le jeune est caché dans la végétation dense pour éviter les prédateurs. La mère le visite plusieurs fois par jour pour l’allaiter. Le sevrage intervient après 3 à 4 mois, mais le jeune reste avec sa mère jusqu’à ce qu’il soit capable de survivre seul.

Le céphalophe d’Abbott est un animal extrêmement discret et territorial, bien adapté à la vie dans un habitat dense. Il vit seul la plupart du temps, sauf pendant la période de reproduction ou lorsqu’une femelle élève un jeune. Chaque individu défend un territoire qu’il marque à l’aide de glandes odorantes situées près des sabots et du museau. Actif principalement à l’aube et au crépuscule, il évite les périodes les plus chaudes de la journée. Ce bovidé se déplace en silence, utilisant son pelage sombre pour se fondre dans l’ombre. Lorsqu’il est menacé, il peut émettre un aboiement caractéristique avant de fuir à grande vitesse. Les vocalisations sont rares mais comprennent des aboiements d’alerte. Les signaux olfactifs jouent un rôle clé dans la communication territoriale et la reproduction.

PRÉDATION

Le céphalophe d’Abbott, comme la plupart des céphalophes, est la proie de divers prédateurs naturels et humains dans son habitat forestier montagnard.

* Léopards : Le léopard est le principal prédateur naturel de ce céphalophe. Il chasse principalement en embuscade, utilisant sa discrétion et sa force pour capturer des proies. Le léopard exploite le couvert dense des forêts pour rester invisible avant de bondir.

* Chats sauvages d'Afrique : Bien que moins dangereux que les léopards, le chat sauvage d'Afrique peut s’attaquer aux jeunes céphalophes ou aux individus affaiblis.

* Lycaons : Les lycaons, bien qu’ils préfèrent les zones de savane, peuvent pénétrer dans les forêts pour chasser. Leur endurance et leur coordination en meute leur permettent de traquer les céphalophes. Ils s’attaquent généralement aux individus isolés, incapables de fuir rapidement.

* Chacals : Les chacals (chacal à chabraque et chacal à flancs rayés) sont des prédateurs opportunistes qui s’attaquent rarement aux céphalophes adultes, mais ils peuvent être une menace pour les jeunes.

* Aigles couronnés : L'aigle couronné est un rapace capable de capturer des proies de taille moyenne, y compris de jeunes céphalophes. Grâce à sa vue perçante et ses serres puissantes, il constitue une menace dans les zones forestières.

La prédation, bien qu’importante, est généralement équilibrée dans un écosystème sain. Cependant, des pressions anthropiques comme le braconnage et la fragmentation de l’habitat augmentent la vulnérabilité du céphalophe d’Abbott. La réduction des refuges naturels rend cet animal plus facilement accessible à ses prédateurs, affectant potentiellement la dynamique de sa population.

MENACES

L'une des principales menaces qui pèsent sur cette espèce est le piégeage au collet, pratiqué à faible échelle dans le parc national des monts Udzungwa (forêt de Mwanihana), où le niveau de protection est relativement élevé. Le piégeage au collet a également été signalé dans d'autres sites (réserve forestière d'Uzungwa Scarp, hautes terres du sud, monts Usambara de l'ouest), mais à des niveaux plus élevés. Le céphalophe d'Abbott est également affecté par la perte d'habitat due à l'empiétement agricole et à l'exploitation forestière sélective. On ne sait pratiquement rien de l'écologie de cette espèce, mais on peut prévoir que l'exploitation forestière sélective aura des effets négatifs sur un céphalophe de la taille et de la faible densité du céphalophe d'Abbott.

CONSERVATION

Avec moins de 2 500 individus sauvages, le céphalophe d'Abbott est considéré comme une espèce hautement menacée. Il est inscrit dans la catégorie "En danger" (EN) sur la Liste rouge de l'IUCN.

Le parc national des monts Udzungwa est surveillé par des gardes anti-braconnage et aucune utilisation d'animaux n'est autorisée. Cependant, la capture de céphalophes d'Abbott dans des pièges se produit toujours dans la forêt de Mwanihana, au sein du parc. À l'exception du mont Kilimandjaro, où la plupart des forêts ont récemment été intégrées au parc national, aucune gestion n'est assurée dans tous les autres sites.

Les travaux en cours dans les hautes terres du sud, qui emploient des chasseurs dans des initiatives d'éducation environnementale en échange de l'arrêt de la chasse, ont rencontré un certain succès. Il est trop tôt pour dire si cela aura un impact positif significatif sur les populations de céphalophes d'Abbott, bien que cela puisse s'avérer un modèle précieux pour la conservation dans d'autres sites et soit mené parallèlement à l'utilisation du céphalophe d'Abbott comme espèce phare dans les programmes d'éducation villageoise.

Les principales mesures de gestion de la conservation qui amélioreraient la protection du céphalophe d'Abbott sont l'extension du parc national des monts Udzungwa pour inclure d'importantes forêts actuellement non protégées, en particulier Uzungwa Scarp, Iyondo et Matundu. Il est également nécessaire d’inclure le mont Rungwe dans le nouveau parc national de Kitulo et de renforcer l’application de la loi dans les zones qui ne sont pas actuellement suffisamment protégées (comme les forêts des hautes terres du sud, les monts Usambara et Uluguru). Les connexions forestières essentielles, comme le corridor dégradé de Bujingijila reliant le mont Rungwe à la forêt de Livingstone à Kitulo, doivent être protégées de manière adéquate.

CLASSIFICATION

Fiche d'identité

Nom commun	Céphalophe d'Abbott
English name	Abbott's duiker
Español nombre	Duiquero de Abbott
Règne	Animalia
Embranchement	Chordata
Sous-embranchement	Vertebrata
Classe	Mammalia
Sous-classe	Theria
Infra-classe	Eutheria
Ordre	Artiodactyla
Sous-ordre	Ruminantia
Famille	Bovidae
Sous-famille	Cephalophinae
Genre	Cephalophus
Nom binominal	Cephalophus spadix
Décrit par	Frederick William True
Date	1890
Satut IUCN

SOURCES

Arkive

Global Biodiversity Information Facility (GBIF)

iNaturalist

Liste rouge IUCN des espèces menacées

Mammal Diversity Database

Système d'information taxonomique intégré (ITIS)

Ultimate Ungulate

Wilson, D. E., & Mittermeier, R. A. (Eds.) (2011). Handbook of the Mammals of the World, Vol. 2: Hoofed Mammals. Lynx Edicions.

Huffman, B. Cephalophus spadix sur l’Encyclopedia of Life (EOL).

Maro, P. M., & Mligo, C. (2015). Étude sur l'impact de la déforestation dans les monts Udzungwa, habitat du Céphalophe d'Abbott.

Jones, T., & Rovero, F. (2009). Camera trapping in the Eastern Arc Mountains: Biodiversity studies on elusive species.

Rovero, F., & Struhsaker, T. T. (2007). Bushmeat hunting in the Udzungwa Mountains.