Le muntjac du Gonshan (Muntiacus gongshanensis) est un mammifèreongulé appartenant à la famille des cervidés et au genre Muntiacus. Il fait partie des espèces de muntjacs les moins connues, notamment en raison de son comportement discret, de la difficulté d'accès à son habitat naturel et de sa découverte relativement tardive par la science. Classé dans la catégorie "Données insuffisantes" (DD) par l'IUCN, sa population est considérée comme en déclin, principalement en raison de la fragmentation de son habitat et de la chasse, ce qui souligne l'urgence d'approfondir les recherches pour sa conservation.
Muntjac du Gongshan (Muntiacus gongshanensis) Crédit photo: Alex Kantorovich - Zooinstitutes
Le muntjac du Gongshan est un cervidé de taille moyenne à petite, affichant un corps relativement trapu et une hauteur au garrot qui ne dépasse généralement pas 50 à 60 centimètres, bien que des sources divergent légèrement sur ce point, certaines suggérant que les femelles pourraient être un peu plus grandes que les mâles en termes de hauteur. Le poids de cet animal se situe dans une fourchette allant d'environ 18 à 24 kilogrammes, le plaçant parmi les muntjacs de taille intermédiaire.
Le pelage se distingue par une coloration sombre, généralement un brun-châtain foncé à noir, s'harmonisant avec l'ambiance des sous-bois forestiers. Cette ressemblance morphologique étroite avec le muntjac noir (Muntiacus crinifrons) a historiquement compliqué son identification et son étude. Le mâle se caractérise par la présence de bois courts en forme de dague, portés sur de longs pédicules recouverts de peau, et qui sont souvent partiellement cachés par une touffe de poils rougeâtres sur le front, même si certaines descriptions soulignent une touffe frontale moins développée que chez le muntjac noir.
Un trait primitif, conservé chez les muntjacs et très visible chez le mâle, réside dans ses canines supérieures allongées qui dépassent de la mâchoire, ressemblant à de petites défenses et jouant un rôle important dans les combats territoriaux. La tête est relativement pâle par rapport au corps, avec des lignes plus sombres le long des pédicules des bois. Les femelles, quant à elles, ne portent pas de bois, mais peuvent présenter une touffe de poils plus proéminente latéralement sur le crâne.
La répartition géographique du muntjac du Gongshan, décrit initialement dans le Yunnan (sud-ouest de la Chine) en 1990, est caractérisée par une complexité et une incertitude considérables en raison de la confusion taxonomique avec des espèces morphologiquement similaires, notamment le muntjac noir. La présence de l'espèce est formellement validée dans le Yunnan, sur une latitude s'étendant d'environ 25° à 28°10 N, ainsi que dans l'État de Kachin au nord du Myanmar, comme l'attestent des spécimens de muséum bien que non catalogués sous ce nom spécifique. De nombreuses photographies récentes obtenues par pièges photographiques dans le nord du Myanmar (parcs nationaux de Hkakaborazi et de Hponkanrazi) sont morphologiquement compatibles avec le muntjac du Gongshan, renforçant l'hypothèse d'une distribution validée dans ces zones.
L'aire de répartition probable s'étend au sud-est du Tibet, où des signalements d'animaux, identifiés par l'ADN mitochondrial comme des muntjacs noirs mais sans validation morphologique suffisante pour écarter le muntjac du Gongshan, ont été effectués près de la frontière entre la Chine, l'Inde et le Myanmar. De même, la présence de l'espèce est soupçonnée dans l'Arunachal Pradesh en Inde : bien que les premières découvertes aient été rapportées sous le nom de muntjac noir, les spécialistes suggèrent qu'elles pourraient plus probablement se référer au muntjac du Gongshan, ou potentiellement au muntjac de Roosevelt en raison de la ressemblance de certains restes et trophées.
En outre, certaines images de muntjacs non identifiés par piège photographique au Laos et au Vietnam pourraient également appartenir à cette espèce ou à un taxon étroitement lié, compte tenu de sa similitude externe avec certains individus du muntjac de Roosevelt. En somme, si toutes ces mentions s'avéraient exactes, la répartition géographique du muntjac du Gongshan serait bien plus vaste que les zones actuellement confirmées par les spécimens, soulignant le besoin urgent de recherches taxonomiques et génétiques pour clarifier son aire de distribution réelle et son statut de conservation.
Ce cervidé est un habitant typique des forêts subtropicales et tempérées, vivant dans des zones d'altitude qui peuvent varier considérablement, y compris les forêts de plaine. L'aire de répartition du muntjac du Gongshan chevauche les zones géographiques de l'Écozone Paléarctique et de l'Écozone Indomalaise. Comme la plupart des muntjacs, il est supposé être un animal solitaire et territorial. Bien que les espèces de ce genre soient généralement considérées comme omnivores, le régime alimentaire de cette espèce, en particulier, serait majoritairement herbivore, se composant de feuilles, de bourgeons et de fruits. Les informations sur son comportement social, son mode de reproduction et ses stratégies de mouvement sont extrêmement limitées en raison de la difficulté à l'observer et à l'étudier dans son milieu naturel.
Muntjac du Gongshan dans la province du Yunnan en Chine Source: Shanghai Birding Di-no license (Licence inconnue)
MENACES
La chasse intensive représente la menace la plus critique pour le muntjac du Gongshan sur l'ensemble de son aire de répartition. Au Myanmar, les muntjacs, y compris ceux du Gongshan, sont traqués non seulement pour leur viande mais aussi pour leurs peaux, largement utilisées dans la confection de vêtements. Cette chasse est menée par des habitants locaux qui vendent les produits pour leurs besoins vitaux, mais elle est surtout amplifiée par des groupes de braconniers professionnels, lourdement armés et non résidents, qui opèrent de manière organisée, notamment dans le Parc National de Hkakaborazi, et dont le nombre est en constante augmentation pour alimenter le commerce illégal d'espèces sauvages.
Bien que les pratiques de chasse dans d'autres pays, comme la Chine, soient moins documentées actuellement, la chasse est également considérée comme une menace majeure. Les régions abritant d'importantes populations d'ongulés attirent inévitablement une forte pression de la part de chasseurs externes. De plus, la dégradation et la fragmentation des forêts, même si une grande partie de la zone du Myanmar a maintenu son couvert forestier, pourraient bientôt aggraver l'impact de la chasse, car elles rendent les populations plus vulnérables. Bien que les besoins précis en habitat de l'espèce soient inconnus, la survie des populations est compromise par la conversion forestière et l'intensification de la chasse dans les zones fragmentées.
En anglais, le muntjac du Gongshan est appelé Gongshan muntjac Source: World Life Expectancy Di-no license (Licence inconnue)
CONSERVATION
Le muntjac du Gongshan est actuellement classé par l'IUCN dans la catégorie "Données insuffisantes" (DD). Ce statut reflète l'incertitude scientifique quant à la taille réelle de sa population, sa répartition précise et son écologie, car c'est une espèce découverte relativement récemment et qui reste extrêmement difficile à observer dans son habitat montagneux et forestier. Le manque de données fiables empêche une évaluation précise du risque d'extinction selon les critères de l'IUCN. Néanmoins, la tendance de la population est généralement perçue comme décroissante, ce qui soulève de vives préoccupations.
En matière de conservation, l'espèce ne bénéficie d'aucun statut particulier à l'échelle internationale, notamment CITES, en raison de la rareté des informations la concernant. Toutefois, la priorité absolue est la réalisation d'études approfondies sur le terrain afin de combler les lacunes en matière de données. Ces recherches doivent permettre de déterminer l'état réel de la population, d'identifier les zones clés de son aire de répartition pour y établir des mesures de protection de l'habitat plus efficaces et de réguler strictement le braconnage. Le muntjac du Gongshan est présent dans quelques zones protégées de Chine, mais des efforts transfrontaliers sont essentiels pour assurer sa survie, étant donné sa présence dans plusieurs pays d'Asie du Sud-Est.
TAXONOMIE
L'histoire taxonomique du muntjac du Gongshan est relativement récente et reflète la difficulté de classer les nombreux muntjacs asiatiques, souvent identifiés par des différences génétiques subtiles plutôt que par des traits morphologiques évidents. Ce cervidé a été décrit officiellement en 1990 par les chercheurs Shi Liming et Ma Shulai (souvent cité simplement comme Ma, 1990), suite à l'analyse d'individus provenant de la région de Gongshan dans la province du Yunnan, en Chine, d'où il tire son épithète spécifique.
Le travail initial qui a mené à son identification reposait principalement sur des études de chromosomes : le muntjac du Gongshan se distingue par un nombre diploïde de chromosomes de 2n=9 chez les mâles et 2n=8 chez les femelles, le plaçant génétiquement entre le muntjac indien (Muntiacus vaginalis, avec 2n=7/6) et le muntjac de Reeves (Muntiacus reevesi, avec 2n=46). Avant cette description, l'espèce était souvent confondue avec le muntjac noir (Muntiacus crinifrons) en raison de sa coloration sombre et de sa ressemblance morphologique.
L'identité distincte du Muntiacus gongshanensis a été initialement accueillie avec une certaine prudence par la communauté scientifique, certains proposant qu'il puisse s'agir d'une sous-espèce ou même d'un synonyme du muntjac noir, dont le statut était déjà bien établi. Cependant, les analyses génétiques et caryologiques ultérieures ont confirmé son statut d'espèce à part entière, renforçant la reconnaissance de Muntiacus gongshanensis au sein du genre. Les sources principales pour la validation taxonomique, conformément aux instructions, confirment cette nomenclature.
L'IUCN reconnaît également l'espèce dans sa Liste rouge, mais lui attribue le statut de conservation "Données insuffisantes" (DD), soulignant la nécessité d'études écologiques supplémentaires pour évaluer avec précision son risque d'extinction. Ce statut taxonomique souligne la complexité de l'évolution du genre Muntiacus dans son ensemble, qui est remarquablement diversifié, avec de nouvelles espèces découvertes encore récemment, comme le muntjac du Truong Son (Muntiacus truongsonensis) ou le muntjac géant (Muntiacus vuquangensis), démontrant que la famille des cervidés continue de révéler de nouvelles lignées.
L'histoire de la classification du muntjac du Gongshan est donc l'illustration de la difficulté à séparer des espèces cryptiques dans des habitats peu accessibles, où les analyses génétiques sont souvent l'outil déterminant pour clarifier les relations phylogénétiques et l'identité des espèces, surtout pour des animaux aux traits morphologiques aussi discrets et variables.
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