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Chien des buissons aux oreilles courtes (Atelocynus microtis)


Le chien des buissons aux oreilles courtes (Atelocynus microtis) est une espèce de canidé énigmatique et peu étudiée, endémique de la forêt amazonienne. Il est l'unique représentant du genre Atelocynus. Cet animal se distingue par sa rareté, son mode de vie solitaire et sa capacité à évoluer dans des milieux denses et humides, loin des zones habitées. Très peu de données fiables existent à son sujet, tant son observation dans la nature demeure exceptionnelle. Ce canidé occupe un rôle discret mais important dans les écosystèmes forestiers sud-américains. Le chien des buissons aux oreilles courtes est également appelé Renard à petites oreilles.


Chien des buissons aux oreilles courtes (Atelocynus microtis)
Chien des buissons aux oreilles courtes (Atelocynus microtis)
© Igor de le Vingne - Wikimedia Commons
CC-BY-SA (Certains droits réservés)



DESCRIPTION

Le chien des buissons aux oreilles courtes présente une morphologie atypique pour un canidé, témoignant d'une forte spécialisation à son habitat forestier. Il mesure entre 75 et 100 cm de long, avec une queue d’environ 30 à 40 cm, et affiche une hauteur au garrot avoisinant les 35 cm. Son poids varie de 7 à 10 kg, ce qui en fait un animal de taille moyenne au sein des canidés.

Son pelage dense, lisse et sombre (souvent gris ardoise ou brun noirâtre) est hydrofuge, probablement en lien avec sa relative affinité pour les milieux aquatiques. Sa tête est courte et arrondie, avec des oreilles petites, arrondies et presque invisibles sous la fourrure, particularité reflétée dans son nom scientifique microtis, signifiant "petites oreilles". Ses membres sont relativement courts mais robustes, adaptés à la progression silencieuse dans la végétation dense et humide. Les pieds sont palmés, une adaptation rare chez les canidés, qui facilite sa nage et sa marche dans les terrains boueux ou marécageux. Les yeux sombres, arrondis, expriment une vivacité marquée.

Sa dentition, typique des carnivores, compte 42 dents, bien qu’il montre des signes de régime omnivore par l'usure variable de ses molaires. L’ensemble de sa morphologie suggère une convergence évolutive avec des carnivores semi-aquatiques tels que la loutre, plutôt qu’avec les canidés classiques des milieux ouverts. Cette singularité anatomique, couplée à sa discrétion, explique en partie pourquoi cette espèce est si rarement observée dans la nature, même dans les régions où elle est supposée fréquente.


Atelocynus microtis
Atelocynus microtis
© Carlos Boada - Bioweb Ecuador
Di-no license (Licence inconnue)

HABITAT

Le chien des buissons aux oreilles courtes se trouve de la Colombie à la Bolivie et du Brésil à l'Équateur, principalement dans les forêts de plaine amazonienne et les contreforts andins (jusqu'à 2 000 m). Sa présence au Venezuela reste incertaine. En 2004, une carte de répartition précise a été établie grâce à la revérification des spécimens de musée et aux observations de terrain confirmées. Un spécimen équatorien, prétendument de l'ouest des Andes, est considéré comme potentiellement mal étiqueté, car il s'agirait de la seule preuve de sa présence dans la région du Chocó. Les erreurs d'identification, notamment avec le renard crabier (Cerdocyon thous), soulignent la nécessité de prudence dans les zones où ces espèces coexistent.

Le chien des buissons aux oreilles courtes privilégie les forêts tropicales humides non perturbées des basses terres amazoniennes. L'espèce a été observée dans une grande variété d'habitats de plaine, notamment les forêts de terre ferme, les forêts marécageuses, les bambouseraies et les successions primaires le long des rivières. À Cocha Cashu, les observations et les traces de l'espèce sont étroitement liées aux rivières et aux ruisseaux, et cinq signalements fiables de chiens des buissons aux oreilles courtes nageant dans les rivières existent. Les observations sont très rares dans les zones fortement perturbées par l'homme, par exemple à proximité des villes ou dans les zones agricoles. On ignore si l'espèce est capable d'utiliser des habitats extérieurs aux forêts humides de plaine. Une observation à Rondonia, au Brésil, a été effectuée dans une forêt de plaine bordant la savane.


Atelocynus microtis répartition
     Répartition actuelle du chien des buissons aux oreilles courtes
© Manimalworld
CC-BY-NC-SA (Certains droits réservés)

ALIMENTATION

Le régime alimentaire du chien des buissons aux oreilles courtes est encore mal connu, en raison de la rareté des observations directes et du peu de spécimens étudiés. Toutefois, les analyses de fèces, les témoignages locaux et les rares données de terrain permettent de reconstituer un schéma alimentaire relativement diversifié et opportuniste, typique d’un omnivore spécialisé dans un environnement tropical humide. Il consomme une grande variété de proies animales, notamment de petits mammifères (rongeurs, marsupiaux), des oiseaux au sol, des amphibiens, des reptiles, ainsi que des insectes. Les crabes et les poissons figurent également dans son régime, ce qui corrobore les observations de comportements semi-aquatiques et l’adaptation de ses pattes palmées.

Son régime inclut aussi des éléments végétaux : des fruits charnus, des baies et parfois des racines ou des tubercules, ce qui témoigne d'une flexibilité alimentaire importante dans un écosystème où la disponibilité des ressources fluctue selon la saison. Cette omnivorie lui permet de s’adapter à des habitats très différents, notamment les forêts primaires, les forêts secondaires, les zones marécageuses et les bordures de rivières. Contrairement à d'autres canidés sud-américains, il semble éviter les charognes et ne fréquente pas les zones agricoles, ce qui le différencie écologiquement de ses congénères.

Chien des buissons aux oreilles courtes en Equateur
Chien des buissons aux oreilles courtes en Équateur
© Galo Zapata Ríos - iNaturalist
CC-BY-NC (Certains droits réservés)

REPRODUCTION

La reproduction du chien des buissons aux oreilles courtes est l’un des aspects les plus obscurs de sa biologie, en grande partie à cause du peu d’individus observés à l’état sauvage ou capturés pour étude. Aucune étude n’a pu encore déterminer avec précision la période de reproduction, bien que certaines observations en captivité ou d’individus juvéniles trouvés dans la nature suggèrent une possible saisonnalité liée au régime des pluies. L'espèce serait monogame ou solitaire, à l’instar de plusieurs canidés néotropicaux, et le lien entre les sexes semble limité à la période de reproduction. Aucune information n’est disponible sur la gestation et la maturité sexuelle.

L’absence d’études approfondies sur la reproduction de cette espèce constitue un obstacle majeur à l’élaboration de stratégies de conservation ciblées. En captivité, la reproduction est extrêmement rare, voire inexistante, en raison des difficultés d’entretien de cette espèce dans un environnement confiné et de son comportement particulièrement craintif, voire stressé, en présence humaine.


Renard à petites oreilles
Le chien des buissons aux oreilles courtes est également appelé
Renard à petites oreilles
© Jono Irvine - iNaturalist
CC-BY-NC (Certains droits réservés)

COMPORTEMENT

Le chien des buissons aux oreilles courtes est un animal notoirement discret, solitaire et crépusculaire, voire nocturne. Il est rarement vu dans la nature, ce qui rend l’observation directe de son comportement particulièrement difficile. Les pièges photographiques ont permis de confirmer qu’il est actif principalement à l’aube et au crépuscule, périodes pendant lesquelles il parcourt la forêt à la recherche de nourriture. Il évolue lentement et silencieusement, avec une démarche basse, caractéristique des espèces forestières furtives. Son comportement territorial est peu documenté, mais les rares observations suggèrent que chaque individu occupe un domaine vital bien défini, qu’il marque vraisemblablement par l’urine ou des sécrétions glandulaires.

Contrairement à d'autres canidés, il ne vit pas en groupe et ne semble pas aboyer. Ses vocalisations sont rares et peu connues, mais pourraient inclure des grognements ou des cris brefs en cas de menace. Lorsqu’il est surpris, il cherche immédiatement refuge dans les broussailles ou les cours d’eau. Ce comportement fuyant, associé à son pelage sombre et sa petite taille, contribue à sa réputation d’animal fantôme. En captivité, les rares individus observés présentent un comportement très craintif, refusant souvent de s’alimenter en présence humaine. Ce tempérament introverti pourrait avoir des implications comportementales complexes liées à sa niche écologique spécifique. Son mode de vie extrêmement secret est probablement l’adaptation clé qui lui permet de survivre dans un environnement aussi compétitif et riche en prédateurs que la forêt amazonienne.


Chien des buissons aux oreilles courtes gros plan.jpg
Gros plan du chien des buissons aux oreilles courtes
© Igor de le Vingne - Wikimedia Commons
CC-BY-SA (Certains droits réservés)

MENACES

Les plus grandes menaces qui pèsent sur le chien des buissons aux oreilles courtes sont les maladies contractées par des chiens domestiques et la perte d'habitat due aux conversions des forêts à grande échelle qui se déroule dans le bassin de l'Amazone. Bien qu'aucune maladie n'ait été signalée chez cette espèce, les maladies canines sont fréquentes chez les chiens domestiques dans la région et on peut envisager qu'elles pourraient être transmises à l'état sauvage à ce renard, avec des conséquences potentiellement dévastatrices. La perte d'habitat (notamment due à la conversion à grande échelle actuellement en cours en Amazonie) et la raréfaction des proies due à la chasse sont d'autres menaces préoccupantes. Aucune persécution généralisée n'a été signalée à ce jour.


Chien des buissons aux oreilles courtes au Pérou
Chien des buissons aux oreilles courtes photographié au Pérou
© Jono Irvine - iNaturalist
CC-BY-NC (Certains droits réservés)

CONSERVATION

Le chien des buissons aux oreilles courtes est classé sur la Liste rouge des espèces menacées de l'IUCN dans la catégorie "Quasi menacée" (NT).

Bien que protégée sur papier dans la plupart des pays de l'aire de répartition, cette protection n'a pas encore été confirmée par des mesures de conservation spécifiques, bien que la présence de l'espèce ait été un facteur majeur des efforts de conservation dans la forêt nationale de Jamari, dans l'ouest du Brésil. Le chien à oreilles courtes est probablement présent dans la plupart des zones protégées qui englobent de vastes étendues de forêt intacte en Amazonie occidentale. Au cours de la dernière décennie, sa présence a été confirmée dans des zones protégées en Bolivie, au Brésil, en Équateur et au Pérou.

Aucun animal n'est actuellement répertorié comme faisant l'objet de programmes officiels d'élevage en captivité. Par le passé, des individus ont été détenus dans plusieurs zoos américains (dont le Lincoln Park Zoo, le National Zoo, le Brookfield Zoo, le Zoo d'Oklahoma City et le Zoo de San Antonio), principalement dans les années 1960 et 1970.

La biologie, la pathologie et l'écologie de l'espèce sont peu connues. Il manque notamment une estimation précise de la densité de population et une compréhension des besoins de l'espèce en matière d'habitat. Une nouvelle technologie de suivi GPS facilitera les études sur la densité, l'utilisation de l'habitat et le domaine vital.


Chien des buissons aux oreilles courtes Bolivie.jpg
Chien des buissons aux oreilles courtes photographié en Bolivie
© Renata Leite Pitman - Sputnik Mundo

TAXONOMIE

L'histoire taxonomique du chien des buissons aux oreilles courtes est tout aussi singulière que celle de son homonyme, le chien des buissons. Cependant, contrairement à ce dernier, il fut identifié pour la première fois à partir d'individus vivants et non de fossiles, dès la fin du XIXe siècle.

L'espèce fut décrite en 1883 par le zoologiste britannique Philip Lutley Sclater. Initialement, Sclater classa cet animal dans des genres existants de canidés, tels que Canis ou Dusicyon, en raison de son apparence. Toutefois, ses caractéristiques uniques, notamment ses petites oreilles rondes et sa morphologie particulière, la distinguaient clairement des autres espèces connues.

Ce n'est qu'en 1940 que le zoologiste espagnol Ángel Cabrera créa un nouveau genre spécifiquement pour cette espèce : Atelocynus. Ce nom, signifiant "chien imparfait" ou "chien sans fin", soulignait la singularité morphologique de cet animal. Atelocynus microtis devint ainsi la seule espèce de ce genre, le rendant monotypique.

Malgré la confusion potentielle due à son nom vernaculaire, les analyses génétiques modernes ont confirmé qu'Atelocynus microtis n'est pas étroitement apparenté au chien des buissons (Speothos venaticus). Alors que les deux sont des canidés forestiers insaisissables d'Amérique du Sud, ils appartiennent à des lignées évolutives distinctes.

Les études phylogénétiques placent plutôt le chien des buissons aux oreilles courtes plus près du renard crabier (Cerdocyon thous) et d'autres renards sud-américains du genre Lycalopex. Cette distinction est cruciale pour comprendre la diversité et l'évolution des canidés néotropicaux.

Actuellement, deux sous espèces sont généralement acceptées pour Atelocynus microtis, reflétant une certaine variation géographique au sein de l'espèce :

- Atelocynus microtis microtis (Sclater, 1883)

- Atelocynus microtis sclateri (J. A. Allen, 1905)

L'étude de cet animal reste un défi en raison de sa rareté et de son habitat dense, mais sa place unique dans la taxonomie des canidés est désormais bien établie.


Short-eared dog
En anglais, le chien des buissons aux oreilles courtes est appelé
Short-eared dog
© Max Withey - iNaturalist
CC-BY-NC (Certains droits réservés)

CLASSIFICATION


Fiche d'identité
Nom communChien des buissons aux oreilles courtes
Autre nomRenard à petites oreilles
English nameShort-eared dog
Español nombreZorro de oreja corta
RègneAnimalia
EmbranchementChordata
Sous-embranchementVertebrata
ClasseMammalia
Sous-classeTheria
Infra-classeEutheria
OrdreCarnivora
Sous-ordreCaniformia
FamilleCanidae
GenreAtelocynus
Nom binominalAtelocynus microtis
Décrit parPhilip Lutley Sclater
Date1883



Satut IUCN

Quasi menacée (NT)

SOURCES

* Liens internes

Animal Diversity Web

Arkive

iNaturalist

Liste rouge IUCN des espèces menacées

Système d'information taxonomique intégré (ITIS)

* Liens externes

Andean Great Treks

BirdPhotos.com

Bioweb Ecuador

Sputnik Mundo

Wikimedia Commons

* Bibliographie

Sclater, P. L. (1883). On a new South American Carnivore. Proceedings of the Zoological Society of London, 1883(2), 241-244.

Cabrera, A. (1940). Notas sobre mamíferos sudamericanos. Notas del Museo de La Plata, 5, 1-28.

Oliveira, T. G. de, & Cassaro, K. (2005). Guia de Identificação dos Carnívoros do Brasil. Instituto Pró-Carnívoros / IBAMA / Fundação O Boticário.

Emmons, L. H., & Feer, F. (1997). Neotropical Rainforest Mammals: A Field Guide (2nd ed.). University of Chicago Press.

Eisenberg, J. F., & Redford, K. H. (1999). Mammals of the Neotropics: Volume 3 – The Central Neotropics. University of Chicago Press.

Courtenay, O., & Maffei, L. (2004). Atelocynus microtis. Mammalian Species, 744, 1-5.

Wayne, R. K., Geffen, E., Girman, D. J., Koepfli, P. K., & Valadez, R. (1997). Molecular Systematics of the Canidae. Systematic Biology, 46(4), 622-653.