Céphalophe d'Ogilby (Cephalophus ogilbyi)
Le céphalophe d'Ogilby (Cephalophus ogilbyi) est un mammifère herbivore appartenant à la famille des bovidés dans le genre Cephalophus. Originaire des forêts tropicales d'Afrique de l'Ouest, cette antilope se rencontre principalement en Côte d'Ivoire, au Libéria, en Sierra Leone et au Ghana, où elle évolue dans des habitats denses et ombragés.
Le céphalophe d'Ogilby est un ongulé mesurant entre 50 et 70 cm au garrot avec une longueur corporelle d'environ 80 à 115 cm. Son poids varie généralement entre 15 et 20 kg, bien que certains individus puissent être légèrement plus lourds.
Le pelage du céphalophe d’Ogilby est fin et dense, offrant une excellente protection contre les branches et les insectes. Sa coloration varie du brun rougeâtre au brun foncé, avec une teinte plus claire sur le ventre et parfois des marques plus sombres sur la tête et le dos. Cette coloration discrète lui permet de se fondre dans son habitat forestier. Ses jambes sont relativement courtes mais robustes, ce qui lui confère une grande agilité dans un terrain accidenté.
Une caractéristique notable est la présence de petites cornes droites, généralement présentes chez les deux sexes, bien que celles des femelles soient souvent plus petites. Ces cornes mesurent entre 5 et 10 cm et sont souvent légèrement incurvées vers l'arrière. La tête est compacte, avec de grands yeux sombres adaptés à la faible luminosité des forêts. Ses oreilles, petites et rondes, sont mobiles et lui permettent de détecter les bruits subtils.
Assez semblable en apparence au céphalophe à bande dorsale (Cephalophus dorsalis), le céphalophe d'Ogilby se distingue par ses longues jambes, plus minces, et sa coloration plus pâle.
Le céphalophe d'Ogilby a une répartition disjointe dans quatre zones de la zone forestière équatoriale en Afrique de l'Ouest et du Centre : le céphalophe de Brooke (Cephalophus ogilbyi brookei) est endémique de la forêt de Haute-Guinée en Afrique de l'Ouest, de la Sierra Leone au sud-est de la Côte d'Ivoire et au sud-ouest du Ghana. La sous-espèce nominale (Cephalophus ogilbyi ogilbyi) est présente sur l'île de Bioko (Guinée équatoriale) et dans le sud-est du Nigéria et le sud-ouest du Cameroun. Le céphalophe à pattes blanches (Cephalophus ogilbyi crusalbum) est présent au Gabon, principalement au sud du fleuve Ogooué, et à l'extrême nord-ouest de la République du Congo.
Son habitat de prédilection est la forêt primaire humide de plaine, mais il est commun dans les parcelles forestières de la mosaïque forêt-savane. Il a été observé dans des zones où se trouvent un mélange de haute futaie et de forêt exploitée, ou de haute futaie et de forêt secondaire (mais semble être très rare dans la forêt secondaire fortement modifiée). À Bioko, l'espèce est également présente dans la forêt de montagne (à des altitudes supérieures à 2 000 m) et dans la zone forestière de Schefflera de plus haute altitude, habitats qui sont normalement occupés par d'autres espèces de céphalophes sur le continent.
Le céphalophe d’Ogilby est un herbivore opportuniste dont le régime alimentaire est varié. Il se nourrit principalement de fruits, de feuilles, de bourgeons, de fleurs et de graines. Il consomme également des écorces tendres et des champignons, surtout en période de pénurie alimentaire. Ce régime lui permet de répondre aux exigences nutritionnelles dans des environnements où la disponibilité des ressources varie en fonction des saisons. L’un des comportements alimentaires les plus intéressants de cette espèce est sa dépendance aux fruits tombés des arbres. Le céphalophe suit souvent les cycles de fructification de certaines espèces d’arbres, ce qui influence ses déplacements dans la forêt. Il joue un rôle important dans la dispersion des graines, contribuant ainsi à la régénération de la forêt. De plus, il est parfois observé en train de manger des matières animales comme des oeufs d'oiseaux, des invertébrés ou des restes de petits animaux, ce qui est inhabituel pour une antilope. Ce comportement pourrait être lié à la recherche de protéines supplémentaires ou d’autres nutriments rares dans son environnement.
La reproduction du céphalophe d’Ogilby est mal documentée, mais les observations disponibles suggèrent qu’il a un mode de reproduction similaire à celui des autres céphalophes. L’espèce est généralement monogame, les couples établissant un territoire commun. La période de reproduction peut se produire tout au long de l’année, bien qu’il puisse y avoir des pics de naissance pendant les saisons les plus favorables en termes de disponibilité alimentaire. La gestation dure environ 5 à 7 mois, après quoi une seule progéniture est mise bas. Le nouveau-né est bien développé à la naissance, avec un pelage doux et un comportement discret, ce qui lui permet de rester caché pendant les premiers jours de sa vie. La mère cache le petit dans des endroits denses et ne le visite que brièvement pour l’allaiter, réduisant ainsi les risques de prédation. Le sevrage survient généralement vers 3 à 4 mois, mais le jeune peut rester avec sa mère pendant une période plus longue avant de devenir complètement indépendant. Les céphalophes atteignent leur maturité sexuelle entre 12 et 18 mois. La faible fécondité de cette espèce, couplée aux menaces anthropiques, rend la conservation de ses populations particulièrement préoccupante.
Le céphalophe d’Ogilby est un animal diurne, bien qu’il puisse également être actif à l’aube et au crépuscule. Il est solitaire ou vit en couples monogames, ce qui est typique des céphalophes. Chaque individu ou couple établit un territoire clairement délimité, qu’il marque avec des sécrétions de glandes situées sous les yeux. Ces glandes jouent également un rôle dans la communication chimique avec d'autres membres de l'espèce. Extrêmement discret, le céphalophe d'Ogilby passe la majeure partie de son temps à explorer son territoire à la recherche de nourriture. Il utilise ses sens développés, en particulier l’odorat et l’ouïe, pour détecter les dangers ou localiser des ressources. Lorsqu’il se sent menacé, il se fige pour évaluer la situation avant de fuir rapidement dans les sous-bois. Ses mouvements sont rapides et agiles, ce qui lui permet de naviguer facilement dans des environnements denses. Il communique principalement par des signaux visuels et chimiques, bien que des vocalisations soient parfois utilisées, en particulier pour alerter d’un danger ou pour maintenir le contact entre une mère et son petit. Des comportements d’intimidation, comme le piétinement ou l'abaissement de la tête, peuvent être observés lors de conflits territoriaux.
Dans son habitat naturel, le céphalophe d’Ogilby est confronté à une variété de prédateurs naturels. Pour se défendre contre ces prédateurs, le céphalophe s’appuie sur plusieurs stratégies. Sa petite taille et sa coloration cryptique lui permettent de se camoufler efficacement dans la végétation dense. En cas de danger, il adopte souvent une posture immobile pour éviter d’être repéré. Si l'ennemi s’approche, il s’enfuit en utilisant des sentiers bien connus, ce qui lui donne un avantage de vitesse et de maniabilité.
* Léopards : Le léopard est le principal prédateur terrestre du céphalophe d’Ogilby. Il utilise son agilité et sa discrétion pour surprendre ses proies. Il se déplace silencieusement dans la végétation dense et s'approche au plus près avant de bondir. Il profite souvent des moments où le céphalophe est occupé à se nourrir, notamment sous des arbres fruitiers. Il transporte souvent sa proie dans un arbre pour la protéger des charognards.
* Aigles couronnés : L'aigle couronné, l'un des plus puissants rapaces d'Afrique, est un prédateur redoutable, surtout pour les jeunes céphalophes. Il utilise sa vue perçante pour repérer ses proies depuis les hauteurs de la canopée. Il plonge ensuite rapidement pour capturer l’animal avec ses puissantes serres. Les jeunes, plus vulnérables et moins prudents, sont souvent les victimes. Cependant, un adulte peut également être attaqué si l’aigle réussit à le surprendre dans un espace dégagé.
* Aigles couronnés : Les grands serpents, comme le python de Seba, sont des prédateurs moins fréquents mais tout de même significatifs. Les pythons sont des chasseurs embusqués. Ils se cachent dans des zones où les céphalophes viennent s’abreuver ou se nourrir. Les jeunes et les adultes sont tous deux susceptibles d’être capturés, bien que les adultes plus gros puissent parfois échapper à une attaque.
* Carnivores opportunistes (civettes, genettes et mangoustes) : Des petits carnivores comme la civette africaine, la genette commune et certaines espèces de mangoustes peuvent s’attaquer aux jeunes céphalophes. Ces prédateurs cherchent activement des proies faciles, notamment des jeunes laissés seuls pendant que leur mère cherche de la nourriture. Ces carnivores utilisent leur agilité pour explorer des zones denses où les petits céphalophes sont cachés. Une fois détectés, ils les attaquent rapidement.
* Hyènes : Les hyènes tachetées et les hyènes brunes, bien que moins associées aux habitats forestiers denses, peuvent représenter une menace dans des zones de transition entre forêt et savane. Les hyènes chassent en solitaire ou en petits groupes, utilisant leur endurance pour poursuivre leurs proies sur de longues distances. Elles sont moins adaptées aux forêts denses, mais elles exploitent les zones dégagées ou les corridors forestiers pour attraper les céphalophes en fuite.
L'espèce est menacée par la destruction de son habitat (due à l'agriculture, à l'occupation humaine et à l'exploitation forestière) et par une chasse intense, principalement pour la viande de brousse. Bien que la chasse soit pratiquée dans toute l'aire de répartition, elle est particulièrement sévère à Bioko.
Le céphalophe d'Ogilby n'est pas considéré comme une espèce menacée. Il est inscrit dans la catégorie "Préoccupation mineure" (LC) sur la Liste rouge de l'IUCN et en Annexe II de la CITES.
Le céphalophe de Brooke (Cephalophus ogilbyi brookei) n'est désormais présent en nombre raisonnable que dans quelques zones, comme le parc national de Sapo et quelques autres forêts de l'est du Libéria et le Parc national de Taï dans le sud-ouest de la Côte d'Ivoire. Il a disparu des sanctuaires de faune de Bomfobiri et d'Owabi où il était autrefois présent, mais a été observé dans le parc national de Kakum par Wilson (2001).
La population continentale de la sous-espèce nominale (Cephalophus ogilbyi ogilbyi) n'a plus que quelques bastions restants, par exemple le parc national de Korup (Cameroun) et le parc national de Cross River (Nigéria). Il a également été observé dans plusieurs réserves forestières. Il reste relativement nombreux sur l'île de Bioko (Guinée équatoriale). La protection efficace de la Réserve scientifique de Gran Caldera de Luba est essentielle à la survie de cette espèce sur l'île de Bioko.
Le céphalophe à pattes blanches (Cephalophus ogilbyi crusalbum) est désormais connu pour être relativement répandu et nombreux au Gabon, y compris dans des zones protégées telles que Lope et le complexe de Gamba, et le parc national d'Odzala (Congo).
Le céphalophe d’Ogilby se divise en plusieurs sous-espèces, principalement sur la base de différences morphologiques, de coloration et de répartition géographique. Celles-ci sont adaptées à des régions spécifiques d’Afrique de l’Ouest et centrale. Il est à noter que l'ITIS ainsi que de nombreux auteurs n'acceptent que deux sous-espèces alors que l'IUCN en compte trois d'après les travaux de Wilson 2001 et Kingdon 2013 :
- Cephalophus ogilbyi ogilbyi : C'est la sous-espèce nominale. Elle est présente principalement en Afrique de l’Ouest, notamment en Sierra Leone, au Liberia, en Côte d'Ivoire et dans les régions limitrophes de la Guinée. Elle se distingue par un pelage brun rougeâtre uniforme. Elle fréquente les forêts pluviales denses, notamment les forêts primaires et secondaires.
- Cephalophus ogilbyi crusalbum : (céphalophe à pattes blanches). Cette sous-espèce se trouve dans les zones montagneuses de la Guinée équatoriale, du Cameroun et dans certaines parties du Nigeria. Son nom fait référence à ses pattes claires, qui contrastent avec le reste du corps sombre. Le pelage est généralement plus sombre, avec une teinte brun foncé à noire, et des pattes souvent blanchâtres ou gris pâle. Elle est souvent associée aux zones forestières montagnardes et sub-montagnardes.
- Cephalophus ogilbyi brookei : Le céphalophe de Brooke n'est considéré comme sous-espèce que par l'IUCN. Il est localisé dans le sud-est du Nigeria, le Cameroun, et les zones adjacentes de la Guinée équatoriale et du Gabon. Son pelage est légèrement plus foncé, souvent avec une teinte brun noirâtre sur le dos et les flancs. Il préfère les forêts pluviales denses, mais peut également être trouvée dans les zones de transition entre les forêts et les savanes.
La classification des sous-espèces du céphalophe d’Ogilby est sujette à débat parmi les scientifiques. Les différences morphologiques, bien que notables, sont parfois difficiles à relier à des populations géographiques précises en raison des chevauchements de distribution et des variations locales. De plus, les études génétiques récentes sur les céphalophes suggèrent que des croisements et des hybrides sont possibles avec le Céphalophe de Peter Cephalophus callipygus et des recherches plus approfondies sont souhaitables.
Nom commun | Céphalophe d'Ogilby |
English name | Ogilby's duiker |
Español nombre | Duiquero De Ogilby |
Règne | Animalia |
Embranchement | Chordata |
Sous-embranchement | Vertebrata |
Classe | Mammalia |
Sous-classe | Theria |
Infra-classe | Eutheria |
Ordre | Artiodactyla |
Sous-ordre | Ruminantia |
Famille | Bovidae |
Sous-famille | Cephalophinae |
Genre | Cephalophus |
Nom binominal | Cephalophus ogilbyi |
Décrit par | George Robert Waterhouse |
Date | 1838 |
Satut IUCN |
Liste rouge IUCN des espèces menacées
Système d'information taxonomique intégré (ITIS)
Kingdon, J. (2013). The Kingdon Field Guide to African Mammals. Bloomsbury Publishing, London.
Estes, R. D. (1991). The Behavior Guide to African Mammals: Including Hoofed Mammals, Carnivores, Primates. University of California Press.
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