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Loup de Terre-Neuve (Canis lupus beothucus)


Le loup de Terre-Neuve (Canis lupus beothucus) est une sous-espèce éteinte du loup gris, autrefois endémique de l'île de Terre-Neuve au Canada. Peu étudié de son vivant et aujourd’hui disparu, il représente un exemple emblématique de la disparition silencieuse d’un prédateur endémique sous la pression humaine. Étroitement lié à l’histoire écologique et culturelle de l’île, ce canidé jouait un rôle essentiel dans les dynamiques trophiques locales. Malgré une documentation limitée, son existence est attestée par des spécimens de musée et quelques récits historiques. L'extinction de cette sous-espèce, officiellement déclarée au début du XXe siècle, souligne l’impact irréversible de l’expansion humaine sur des écosystèmes insulaires isolés.


Loup de Terre-Neuve (Canis lupus beothucus)
Loup de Terre-Neuve (Canis lupus beothucus)
Source: Tripadvisor



DESCRIPTION

Le loup de Terre-Neuve était une sous-espèce de loup de taille moyenne à grande, bien que les données précises soient limitées en raison de la rareté des spécimens conservés. Les descriptions historiques suggèrent qu'il était légèrement plus grand et plus robuste que le loup de l'Est (Canis lycaon), mais probablement plus petit que le loup des plaines (Canis lupus nubilus).

Son pelage était généralement de couleur claire, variant du blanc crème au gris clair, avec parfois des teintes roussâtres sur le dos et les flancs. Cette coloration lui aurait probablement offert un camouflage efficace dans les paysages enneigés et les zones de toundra de Terre-Neuve. Les observations de son pelage étaient souvent liées aux saisons, devenant plus épais et plus clair en hiver. Ses pattes étaient relativement longues, et ses oreilles étaient de taille modérée, dressées.

Le crâne du loup de Terre-Neuve présentait des caractéristiques typiques des loups, avec une mâchoire puissante et des dents adaptées à la chasse et à la consommation de grandes proies.


Canis lupus beothucus
Canis lupus beothucus
© George Ian Bowles - Wikimedia Commons
CC-BY (Certains droits réservés)

HABITAT

Le loup de Terre-Neuve était strictement endémique de l'île de Terre-Neuve, située au large de la côte est du Canada. Son aire de répartition était limitée à cette masse terrestre insulaire, où il occupait une variété d'habitats allant des forêts boréales denses aux landes ouvertes et aux régions de toundra alpine, notamment dans les hauts plateaux et les zones côtières. La présence de cette sous-espèce sur l'île était probablement le résultat d'une colonisation pendant une période de glaciation où un pont terrestre ou des conditions de glace permettaient le passage depuis le continent nord-américain. Une fois établi, il a évolué de manière isolée, développant des caractéristiques distinctes. Les populations de loups étaient probablement réparties sur l'ensemble de l'île, suivant les mouvements de leurs principales proies.

Le loup de Terre-Neuve occupait une diversité d'habitats sur l'île de Terre-Neuve, reflétant la topographie et la végétation variées de l'île. Il était présent dans les vastes étendues de forêts boréales, composées principalement d'épinettes noires, de sapins baumiers et de bouleaux, où il pouvait trouver refuge et chasser. Il fréquentait également les zones ouvertes de landes et de toundra, particulièrement dans les régions intérieures et les hauts plateaux. Les rivières et les lacs étaient également des éléments importants de son habitat, servant de sources d'eau et parfois de corridors de déplacement. Cette capacité à naviguer dans différents écosystèmes était essentielle pour sa survie sur l'île.


Canis lupus beothucus distribution
     Répartition actuelle du loup de Terre-Neuve
© Manimalworld
CC-BY-NC-SA (Certains droits réservés)

BIOLOGIE

Le loup de Terre-Neuve était un carnivore opportuniste, dont le régime alimentaire reposait principalement sur le caribou, qui était abondant sur l'île. En tant que prédateur de grande taille, il jouait un rôle crucial dans la régulation des populations de ces cervidés, contribuant à maintenir la santé et la vigueur du troupeau en ciblant les individus faibles, malades ou âgés. En plus du caribou, il se nourrissait probablement d'autres proies disponibles, telles que des lièvres, des petits rongeurs, des oiseaux, et éventuellement des phoques échoués sur les côtes, surtout pendant les périodes de pénurie de caribous.

Concernant le comportement, on suppose que le loup de Terre-Neuve vivait en meutes, une structure sociale typique des loups gris. Leur taille variait en fonction de la disponibilité des proies et de la densité de population. Ces meutes auraient coopéré pour chasser le caribou, utilisant des stratégies de poursuite et d'encerclement pour abattre de grandes proies. Les territoires de chasse étaient vastes, couvrant des zones considérables pour suivre les mouvements saisonniers des caribous. Le comportement territorial, la communication par hurlements et le marquage olfactif étaient probablement des aspects importants de leur vie sociale, similaires aux autres sous-espèces de loups gris.


Loup de Terre-Neuve gros plan
Gros plan du loup de Terre-Neuve
Auteur: Inconnu

EXTINCTION

L'extinction du loup de Terre-Neuve est un exemple tragique de l'impact des activités humaines sur la faune sauvage. La principale cause de sa disparition fut la persécution directe par les colons européens. À partir du XVIIIe siècle, et de manière plus intensive au XIXe siècle, les loups furent considérés comme une menace pour le bétail et les cervidés, en particulier les caribous, qui étaient une source de nourriture et de revenus pour les habitants. Des programmes de primes furent mis en place par le gouvernement local pour encourager l'abattage des loups. Chaque carcasse rapportée permettait de toucher une récompense, incitant ainsi à une chasse intensive et non durable.

La diminution drastique des populations de caribous due à la surchasse par les humains contribua également à la rareté des loups, réduisant leur principale source de nourriture. Le dernier loup de Terre-Neuve aurait été abattu en 1911, marquant la disparition définitive de cette sous-espèce. L'isolement insulaire de Terre-Neuve, bien que protégeant la sous-espèce de l'hybridation, la rendit également plus vulnérable à la pression de chasse, sans possibilité de repeuplement depuis le continent. Le loup de Terre-Neuve a été officiellement déclaré éteint en 1930.


Newfoundland wolf
En anglais, le loup de Terre Neuve est appelé Newfoundland wolf
Source: Fur Affinity

TAXONOMIE

L'histoire taxonomique du loup de Terre-Neuve est un exemple intéressant de la classification des espèces éteintes. Sa description formelle a été réalisée par les zoologistes américains Glover M. Allen et Thomas Barbour en 1937. Leur travail a été publié dans le prestigieux Journal of Mammalogy, sous le titre "The Newfoundland Wolf". Cette description était basée sur l'analyse minutieuse de spécimens physiques (principalement des crânes et quelques peaux) collectés sur l'île avant l'extinction de la sous-espèce, et conservés dans des muséums d'histoire naturelle.

Allen et Barbour ont identifié des caractéristiques morphologiques distinctes chez ces spécimens par rapport aux loups continentaux voisins. Ces différences, bien que subtiles, étaient jugées suffisantes pour justifier la classification du loup de Terre-Neuve comme une sous-espèce unique. Le nom "beothucus" a été choisi par Allen et Barbour en hommage au peuple Béothuk, les habitants autochtones de l'île de Terre-Neuve, qui avaient eux aussi tragiquement disparu de l'île quelques décennies auparavant. Ce choix de nom souligne un parallèle historique entre la disparition de l'espèce animale et celle de la culture humaine unique à cette île.

Bien que la validité de toutes les sous-espèces de loups ait fait l'objet de débats et de révisions au fil du temps, notamment avec l'avènement des analyses génétiques, le statut de Canis lupus beothucus est généralement accepté par la communauté scientifique. L'absence de matériel génétique frais empêche des études ADN complètes, mais les preuves morphologiques demeurent suffisantes pour soutenir sa désignation. L'histoire taxonomique de ce loup souligne l'importance des collections de musées pour la compréhension de la biodiversité passée.


CLASSIFICATION


Fiche d'identité
Nom communLoup de Terre-Neuve
English nameNewfoundland wolf
Español nombreLobo de Terranova
RègneAnimalia
EmbranchementChordata
Sous-embranchementVertebrata
ClasseMammalia
Sous-classeTheria
Infra-classeEutheria
OrdreCarnivora
Sous-ordreCaniformia
FamilleCanidae
GenreCanis
EspèceCanis lupus
Nom binominalCanis lupus beothucus
Décrit parThomas Barbour
Glover Morrill Allen
Date1937



Satut IUCN

Espèce éteinte (EX)

SOURCES

* Liens internes

Liste Rouge IUCN des espèces menacées

Mammal Species of the World (MSW)

Système d'information taxonomique intégré (ITIS)

* Liens externes

Fur Affinity

International Wolf Center

Le hurlement des loups

The Wolf Intelligencer

Tripadvisor

Wikimedia Commons

* Bibliographie

Allen, Glover M., and Thomas Barbour (1937). "The Newfoundland Wolf." Journal of Mammalogy 18, no. 2: 229-234.

Nowak, Ronald M. (1995). Walker's Wolves of the World. Johns Hopkins University Press.

Nowak, Ronald M. (1979). "North American Quaternary Canis." Monographs of the Museum of Natural History, University of Kansas 1: 1-154.

Young, Stanley P., and Edward A. Goldman. (1944). The Wolves of North America. American Wildlife Institute. (Réédité par Dover Publications en 1964 et par The University of Nebraska Press en 1994).

Parker, G.R. (1995). "Status of the grey wolf (Canis lupus) in Canada." The Canadian Field-Naturalist 109(3): 331-337.

Banfield, A.W.F. (1974). The Mammals of Canada. University of Toronto Press.

Marshall, I. (1996). A History and Ethnography of the Beothuk. McGill-Queen's University Press.

Hodge, F. W. (1910). Handbook of American Indians North of Mexico. Smithsonian Institution.

Ryan, S. (1994). The Ice Hunters: A History of Newfoundland Sealing to 1914. Breakwater Books.