Pudu du Nord (Pudu mephistophiles)
Le pudu du Nord (Pudu mephistophiles) est le plus petit des cervidés d'Amérique du Sud et l'une des deux espèces du genre Pudu existantes, la seconde espèce étant le pudu du Sud (Pudu puda). Ce mammifère discret et insaisissable est endémique des hautes altitudes des Andes, avec une répartition géographique qui s'étend du sud-ouest de la Colombie, à travers l'Équateur, jusqu'au nord du Pérou. Souvent appelé "cerf nain des Andes", il est parfaitement adapté à son environnement montagneux, caractérisé par des forêts de nuages humides et des landes de páramo. Son nom spécifique, mephistophiles, fait allusion à sa couleur foncée et à son allure parfois décrite comme furtive, rappelant un personnage mythologique associé à l'obscurité.
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All rights reserved (Tous droits réservés)Le pudu du Nord présente une morphologie extrêmement compacte et trapue, une adaptation essentielle pour se déplacer efficacement dans les sous-bois denses et les terrains montagneux escarpés. Il est le plus petit membre de la famille des cervidés, mesurant généralement entre 32 et 35 centimètres de hauteur à l'épaule et pesant seulement de 3 à 6 kilogrammes. Son corps est recouvert d'un pelage épais, long et rugueux, dont la couleur varie du brun rougeâtre au brun foncé, parfois presque noir, une coloration qui offre un camouflage optimal contre le sol sombre et humide de son habitat forestier. La tête est petite, avec de grands yeux et de courtes oreilles arrondies, tandis que le museau est court et large. Les pattes sont courtes et minces, mais étonnamment puissantes, terminées par de petits sabots très adaptés à la marche sur des sols mous et irréguliers.
Contrairement à la plupart des cerfs, les bois des mâles sont très courts, ne dépassant souvent pas 6 à 9 centimètres de long, et sont des structures simples, pointues et non ramifiées. Ces bois sont généralement renouvelés chaque année. La queue est également très courte et peu visible. Cette combinaison de petite taille, de membres courts et de pelage cryptique est un trait morphologique clé qui lui permet d'échapper à la détection et de minimiser la perte de chaleur dans le climat froid et humide de son aire de répartition en haute altitude. Les faons ont des taches blanches sur leur pelage qui s'estompent à mesure qu'ils grandissent.
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All rights reserved (Tous droits réservés)Le pudu du Nord occupe une aire de répartition discontinue et probablement fragmentée, traversant les forêts de montagne et leur limite avec les prairies humides des Andes en Colombie, en Équateur et au Pérou. Son aire de répartition exacte est inconnue et les lacunes de répartition entre les mentions ne sont pas résolues. La seule aire naturelle connue est la forêt sèche du Maranon, située entre la population équatorienne et la population péruvienne, au sud du Maranon.
Le pudu du Nord habite les forêts tropicales et de montagnes tout au long de sa distribution et dans les prairies humides au-dessus de la limite des arbres principalement pour la population nordique, entre 2 000 et 4 000 m. Il se déplace dans les sous-bois quand il est à l'intérieur de la forêt. La petite taille rend l'espèce difficile à détecter.
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CC-BY-NC-SA (Certains droits réservés)L'alimentation du pudu du Nord est strictement herbivore et il est considéré comme un brouteur sélectif ou un "concentrate feeder", ce qui signifie qu'il choisit des aliments de haute qualité et facilement digestibles. Son régime alimentaire est principalement constitué de feuilles tendres, de jeunes pousses, de bourgeons, de fruits et de fleurs trouvés à faible hauteur, souvent dans la strate arbustive ou au niveau du sol de la forêt.
Étant un animal de petite taille, il a un taux métabolique relativement élevé par rapport à son volume corporel, nécessitant donc un apport constant et dense en nutriments et en énergie. Ce besoin l'oblige à rechercher activement des aliments riches en protéines et en sucres, au lieu de se contenter de grandes quantités de fourrage grossier et de faible valeur nutritive. Cette stratégie alimentaire sélective est facilitée par sa petite bouche et son appareil digestif adapté à la digestion rapide de petites quantités d'aliments de haute qualité. Les fruits sont particulièrement importants pour son régime, le pudu du Nord jouant un rôle crucial dans la dispersion des graines dans l'écosystème de la forêt andine. Pour atteindre certaines feuilles ou fruits, il est capable de se tenir sur ses pattes arrière pendant de courtes périodes. Les besoins en minéraux sont parfois satisfaits en léchant des dépôts de sel naturels ou des roches spécifiques. L'accès à l'eau se fait généralement par la consommation de la végétation, qui est souvent gorgée d'humidité dans les forêts de nuages, ou par la consommation directe d'eau stagnante ou courante.
Auteur : Richard Lydekker
CC0 (Domaine public)La reproduction chez le pudu du Nord suit un cycle relativement saisonnier, bien que les données exactes et détaillées soient moins nombreuses que pour son homologue du Sud. On pense que la période de reproduction principale se déroule principalement entre le printemps et l'été dans l'hémisphère Sud (environ de septembre à mars), mais les observations dans les Andes équatoriennes et colombiennes suggèrent que la reproduction peut avoir lieu toute l'année, avec un pic dans les naissances pendant les périodes de forte disponibilité alimentaire. Les mâles attirent les femelles par des appels et des marquages odorants du territoire, utilisant des glandes préorbitales et interdigitales. Le mâle peut également se livrer à de courts combats territoriaux avec ses bois rudimentaires.
La gestation chez la femelle dure environ six à sept mois. Typiquement, la femelle donne naissance à un seul petit, ou plus rarement à des jumeaux. Le faon naît avec un pelage tacheté, qui lui procure un excellent camouflage contre les prédateurs, et pèse généralement moins d'un kilogramme à la naissance. La mère le cache dans la végétation dense pendant ses premières semaines de vie et ne le visite que pour l'allaiter, une stratégie courante chez les cervidés pour minimiser la prédation. Le sevrage est relativement rapide, le faon commençant à consommer des aliments solides peu de temps après sa naissance, mais l'allaitement peut durer plusieurs mois. La maturité sexuelle est atteinte vers l'âge de 8 à 12 mois pour les femelles et un peu plus tard pour les mâles.
L'espérance de vie du pudu du Nord à l'état sauvage est estimée à environ 8 à 10 ans, mais elle peut être plus longue en captivité. La survie des faons est un facteur critique dans la dynamique des populations, car ils sont particulièrement vulnérables aux prédateurs.
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CC-BY-NC-ND (Certains droits réservés)Le comportement du pudu du Nord est caractérisé par sa nature solitaire, discrète et principalement crépusculaire ou nocturne, bien que des activités diurnes puissent être observées, en particulier dans les zones moins perturbées. Ce sont des animaux extrêmement timides et insaisissables, préférant se cacher dans la végétation dense, ce qui rend leur observation difficile. Le pudu du Nord se déplace souvent en suivant des sentiers étroits et bien établis, qu'il trace à travers le sous-bois.
Chaque individu maintient un domaine vital ou un territoire, qu'il marque régulièrement à l'aide de ses glandes odorantes, notamment les glandes préorbitales et interdigitales, pour communiquer avec ses congénères et délimiter son espace. Lorsqu'il se sent menacé, il utilise sa petite taille et sa rapidité pour se précipiter dans les fourrés épais, adoptant souvent une trajectoire en zigzag pour désorienter les poursuivants. Il est également capable de se figer sur place pour se camoufler, comptant sur son pelage cryptique.
Le comportement social est limité à la période de reproduction, ou à la relation mère-faon. En dehors de ces contextes, les interactions sont généralement brèves et peuvent impliquer des signaux olfactifs plutôt que visuels ou vocaux. Bien qu'il soit principalement terrestre, ce cervidé est un bon nageur lorsqu'il est contraint de traverser des cours d'eau. Son mode de vie solitaire et son activité principalement nocturne sont des mécanismes comportementaux clés pour éviter la prédation dans son environnement.
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CC-BY-NC (Certains droits réservés)Les prédateurs naturels du pudu du Nord comprennent une gamme de carnivores de taille moyenne et grande présents dans son habitat montagneux andin. En raison de sa petite taille et de sa position au bas de la chaîne alimentaire, le pudu du Nord est vulnérable à plusieurs espèces.
Son principal ennemi naturel est probablement le puma (Puma concolor), dont l'aire de répartition chevauche largement celle de ce petit cerf, et qui est capable de chasser efficacement dans les environnements forestiers et de páramo. D'autres prédateurs potentiels comprennent le renard de Magellan (Lycalopex culpaeus), qui pourrait s'attaquer aux faons ou aux juvéniles.
Dans certaines parties de sa distribution, notamment les régions les plus reculées des forêts de nuages, le pudu du Nord peut également être la proie d'ocelots (Leopardus pardalis) et d'autres petits félins comme le chat des Andes (Leopardus jacobita), bien que ces derniers soient moins fréquents. Les rapaces, tels que l'aigle orné (Spizaetus ornatus), pourraient également représenter une menace pour les faons.
La stratégie de survie du pudu du Nord repose fortement sur l'évitement : il utilise son camouflage, se déplace discrètement dans la végétation dense, et s'enfuit rapidement en zigzaguant lorsqu'il est détecté. La prédation est un facteur naturel et essentiel dans la régulation des populations de ce cervidé, mais l'activité humaine a introduit des menaces supplémentaires, notamment la prédation par les chiens domestiques ou errants, qui est devenue une cause de mortalité significative dans les zones proches des établissements humains. La destruction de l'habitat réduit également les couvertures végétales, rendant le pudus plus exposé à ses prédateurs naturels.
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CC-BY-NC-ND (Certains droits réservés)Le pudu du nord a été intensément exploité par les populations locales depuis les années 1950 jusqu'au début des années 1980. Cependant, de nos jours, la conversion de l'habitat et la prédation par les chiens domestiques sont des menaces plus graves. La terre est défrichée pour le développement humain, l'élevage de bétail, l'agriculture, l'exploitation forestière et les plantations d'arbres exotiques. Il est prélevé dans la nature comme animal de compagnie, et exporté illégalement.
Les informations disponibles sont actuellement insuffisantes pour mesurer quantitativement les menaces et les taux de déclin du pudu du Nord et c'est pour cette raison que l'espèce est évaluée dans la catégorie "Données insuffisantes" (VU) sur la Liste rouge de l'IUCN.
Les mesures de conservation recommandées comprennent :
- la réalisation d'études exhaustives sur son statut et l'élaboration de programmes de recherche visant à déterminer l'écologie, les besoins en matière d'habitat, la biologie des populations et l'étendue des menaces;
- le renforcement de la gestion des aires protégées existantes, si nécessaire;
- dans les zones où la chasse de subsistance constitue une menace sérieuse, la recherche de systèmes de subsistance alternatifs ou de méthodes de récolte plus durables;
- l'élaboration de programmes d'éducation à la conservation et le renforcement de l'application de la loi, si nécessaire.
L'espèce est présente dans plusieurs aires protégées à travers son aire de répartition. Certains de ces parcs nationaux sont dépourvus de plans de gestion et nombre d'entre eux ne disposent pas de ressources suffisantes pour assurer une protection adéquate.
L'histoire taxonomique du pudu du Nord est une chronique complexe qui met en lumière les défis de la classification des espèces insaisissables des Andes, et elle est fermement ancrée dans la fin du XIXe siècle. L'espèce fut officiellement décrite en 1896 par le mammalogiste britannique William Edward de Winton. Il nomma ce cervidé à partir d'un spécimen collecté dans la région andine de l'Équateur. Le nom spécifique mephistophiles, évoquant la figure démoniaque de Méphistophélès, fut choisi pour faire allusion au pelage sombre, presque noir, de l'animal et à sa nature furtive, le distinguant clairement de son congénère plus clair et déjà connu, le pudu du Sud (Pudu puda).
Avant cette description, il y a eu une certaine confusion avec d'autres petits cervidés sud-américains. L'espèce fut initialement placée dans le genre Pudu, établi par Gray en 1852. Pendant des décennies, l'étude de l'espèce est restée limitée, en grande partie en raison de son habitat reculé de haute altitude et de son comportement très discret. La relation phylogénétique exacte des pudus au sein des Cervidae a été une source de débat continu. Ils sont classés dans la sous-famille des Capreolinae (cerfs du Nouveau Monde). Des analyses morphologiques et génétiques successives ont confirmé le statut distinct de Pudu mephistophiles par rapport à Pudu puda, mais leur position basale au sein des Capreolinae indique une divergence évolutive précoce.
Plus récemment, les analyses moléculaires menées au XXIe siècle ont suggéré une réévaluation taxonomique majeure. En 2024, des travaux basés sur des preuves génétiques et morphologiques ont conduit à la réhabilitation du genre Pudella pour le pudu du Nord. Ce genre, initialement proposé pour des raisons morphologiques, est désormais supporté par des données moléculaires qui montrent une divergence profonde et ancienne entre le pudu du Nord et le pudu du Sud. Cependant, l'IUCN et GBIF utilisent encore fréquemment la combinaison traditionnelle Pudu mephistophiles en attente d'une consolidation complète de cette révision. Cette transition souligne la nature dynamique de la taxonomie, où de nouvelles données génétiques continuent de remodeler notre compréhension des relations entre les espèces.
Actuellement, le pudu du Nord est majoritairement considéré par les organismes taxonomiques de référence comme une espèce monotypique, ce qui signifie qu'aucune sous-espèce n'est officiellement reconnue comme valide.
| Nom commun | Pudu du Nord |
| English name | Northern pudu |
| Español nombre | Pudú chico |
| Règne | Animalia |
| Embranchement | Chordata |
| Sous-embranchement | Vertebrata |
| Classe | Mammalia |
| Sous-classe | Theria |
| Infra-classe | Eutheria |
| Ordre | Artiodactyla |
| Sous-ordre | Ruminantia |
| Famille | Cervidae |
| Sous-famille | Capreolinae |
| Genre | Pudu Pudella |
| Nom binominal | Pudu mephistophiles Pudella mephistophiles |
| Décrit par | William Edward de Winton |
| Date | 1896 |
Satut IUCN | ![]() |
* Liens internes
Liste Rouge IUCN des espèces menacées
Mammal Species of the World (MSW)
Système d'information taxonomique intégré (ITIS)
* Liens externes
Global Biodiversity Information Facility (GBIF)
* Bibliographie
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