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Cerf de Schomburgk (Rucervus schomburgki)


Le cerf de Schomburgk (Rucervus schomburgki) était un mammifère herbivore endémique de la plaine centrale de Thaïlande, aujourd’hui disparu. Reconnu pour ses bois spectaculaires, aux ramifications complexes et presque géométriques, il représentait une singularité remarquable au sein de la famille des Cervidae. Le cerf de Schomburgk vivait autrefois dans les marécages et prairies inondées, où il dépendait d’un habitat saisonnier riche en herbacées. Découvert scientifiquement au XIXe siècle, il a marqué l’imaginaire par son apparence unique mais a subi une disparition rapide au XXe siècle, victime de la destruction de son habitat et de la chasse. Aujourd’hui, il demeure une espèce emblématique des extinctions récentes provoquées par l’activité humaine, et son histoire illustre l’importance de la conservation et de la vigilance face aux pressions exercées sur la faune sauvage.


Cerf de Schomburgk (Rucervus schomburgki)
Cerf de Schomburgk (Rucervus schomburgki)
Auteur: M. Chance - Ultimate Ungulate
CC0 (Domaine public)



DESCRIPTION

Le cerf de Schomburgk se distinguait principalement par ses bois spectaculaires, qui en faisaient l’un des cervidés les plus singuliers. Les mâles possédaient des bois exceptionnellement ramifiés, présentant une disposition presque en éventail avec de nombreuses tiges secondaires, pouvant atteindre jusqu’à 90 centimètres de longueur. Ces structures impressionnantes étaient non seulement un outil de combat lors de la saison du rut, mais aussi un élément de signal visuel pour rivaliser entre congénères.

Le corps de l’animal rappelait celui des autres cerfs du genre Rucervus, avec une taille moyenne d’environ 1,80 mètre de long, une hauteur au garrot proche de 1,10 mètre et un poids allant de 100 à 120 kg.

Son pelage brun tirant vers le gris était plus sombre en hiver et s’éclaircissait en été. Le dessous du corps, la gorge et l’intérieur des membres affichaient des teintes plus claires, créant un contraste marqué. La queue était courte et blanche sur sa face interne. Les femelles, plus petites et dépourvues de bois, adoptaient une morphologie plus sobre, adaptée à la protection et à la discrétion. Cette combinaison de traits, en particulier les bois remarquables, donnait au cerf de Schomburgk une apparence singulière, immédiatement reconnaissable parmi les cervidés d’Asie.


Rucervus schomburgki
Rucervus schomburgki
Auteur: Inconnu - Ultimate Ungulate
CC0 (Domaine public)

HABITAT

Le cerf de Schomburgk était strictement endémique de la plaine centrale de Thaïlande, une région marécageuse et fertile située autour du bassin du fleuve Chao Phraya. Son aire de répartition était donc extrêmement restreinte, ce qui a largement contribué à sa vulnérabilité. L’espèce affectionnait les plaines inondées, les prairies humides et les zones périodiquement submergées, où elle trouvait une abondance de végétation herbacée saisonnière. Ces milieux, riches en graminées et en plantes aquatiques, constituaient à la fois sa source principale de nourriture et un refuge naturel contre les prédateurs.

Les habitats du cerf de Schomburgk étaient également liés aux cycles des crues annuelles, qui renouvelaient les ressources végétales et entretenaient une mosaïque de zones ouvertes et de fourrés. Cependant, ce lien étroit avec un habitat spécifique a joué contre l’espèce : dès la fin du XIXe siècle, les zones humides de la plaine centrale furent progressivement asséchées pour l’agriculture, notamment pour la riziculture. Cette transformation massive du paysage a fragmenté et détruit les habitats essentiels du cerf, réduisant drastiquement ses zones de vie. À la veille de son extinction, il ne subsistait plus que dans de petites poches isolées, encerclées par les champs et les activités humaines, ce qui le rendait particulièrement exposé aux pressions extérieures.


Rucervus schomburgki distribution
Carte de répartition du cerf de Schomburgk
© Manimalworld
CC-BY-NC-SA (Certains droits réservés)

ÉCOLOGIE

L'écologie du cerf de Schomburgk, basée sur les quelques observations historiques et les caractéristiques de son environnement, suggère un comportement d'herbivore généraliste, capable de s'adapter à une variété de plantes présentes dans son habitat. Son régime alimentaire se composait probablement d'herbes, de feuilles de jeunes arbres et d'arbustes, de fruits et de bourgeons. En raison de son habitat marécageux, il est également probable qu'il consommait des plantes aquatiques et semi-aquatiques. Ces cerfs étaient vraisemblablement des animaux nocturnes ou crépusculaires, se nourrissant à l'aube et au crépuscule pour éviter les températures élevées de la journée et se reposant pendant la chaleur.

Leur comportement social est en grande partie inconnu, mais on suppose qu'ils formaient de petits groupes ou des troupeaux, une caractéristique commune à de nombreux cervidés vivant en milieu ouvert. Les mâles auraient pu vivre en solitaire pendant la majeure partie de l'année, rejoignant les femelles seulement pendant la période de reproduction. La reproduction et la vie sociale de cette espèce sont des mystères, car aucune étude scientifique n'a pu être menée sur des populations sauvages.

Le cerf de Schomburgk était probablement la proie de grands carnivores comme le tigre d'Indochine, ainsi que d'autres prédateurs présents dans la région. Son extinction rapide est le résultat d'une convergence de facteurs, principalement la destruction de son habitat, qui a fragmenté ses populations et les a rendues plus vulnérables à la surchasse. L'équilibre délicat entre cette espèce et son environnement a été rompu par les activités humaines, conduisant à son déclin irréversible.


Cerf de Schomburgk musee histoire naturelle Paris
Cerf de Schomburgk au Musée d'Histoire Naturelle de Paris
© mf9000 - Wikimedia Commons
CC-BY-SA (Certains droits réservés)

EXTINCTION

L’extinction du cerf de Schomburgk résulte d’un enchaînement rapide de pressions anthropiques. Au début du XXe siècle, l’assèchement massif des zones humides du bassin du Chao Phraya, destiné à l’expansion de la riziculture, a détruit la majorité de son habitat naturel. Cette perte brutale a réduit l’espèce à des fragments de population isolés, incapables de se maintenir à long terme. Parallèlement, la chasse a joué un rôle déterminant : l’espèce fut recherchée pour sa chair mais surtout pour ses bois spectaculaires, très prisés comme trophées et objets de commerce. Le dernier individu connu à l’état sauvage aurait été tué en 1932, marquant la disparition officielle de l’espèce dans la nature. Quelques individus auraient survécu en captivité, mais aucune population viable ne put être maintenue, et l’espèce fut déclarée éteinte par l’IUCN dans les années 1930. Néanmoins, des rumeurs persistantes ont circulé jusqu’à la fin du XXe siècle sur d’éventuelles survivances dans des zones reculées, sans jamais être confirmées scientifiquement. La rapidité de cette extinction illustre les conséquences dramatiques de la combinaison entre destruction d’habitat et exploitation directe. Le cerf de Schomburgk constitue aujourd’hui un symbole de perte irréversible, rappelant l’urgence de protéger les espèces restreintes à des aires limitées.

À ce jour, il n'existe qu'un seul spécimen naturalisé qui réside actuellement à Paris au Musée d'Histoire Naturelle de Paris dans la galerie des animaux disparus après avoir vécu dans un zoo jusqu'en 1868.


Schomburgk's deer (Rucervus schomburgki)
En anglais, le cerf de Schomburgk est appelé Schomburgk's deer
Auteur: Vassil - Wikimedia Commons
CC0 (Domaine public)

TAXONOMIE

L’histoire taxonomique du cerf de Schomburgk commence au XIXe siècle, dans un contexte marqué par les explorations naturalistes en Asie du Sud-Est. L’espèce fut décrite pour la première fois en 1863 par Edward Blyth, zoologiste britannique alors conservateur du musée de la Société asiatique du Bengale. Blyth lui donna le nom scientifique Rucervus schomburgki en l’honneur de Sir Robert Hermann Schomburgk, explorateur et diplomate britannique qui oeuvra en Asie.

L’inclusion du cerf de Schomburgk dans le genre Rucervus reposait sur des caractéristiques morphologiques partagées avec d’autres cervidés comme le barasingha (Rucervus duvaucelii), notamment la forme générale du corps et certains traits dentaires. Cependant, ses bois exceptionnellement ramifiés constituaient une singularité qui le distinguait nettement de ses congénères. Durant les décennies suivantes, plusieurs débats taxonomiques eurent lieu concernant son positionnement exact. Certains auteurs l’ont un temps rapproché du genre Cervus, d’autres l’ont maintenu dans Rucervus, reconnaissant sa parenté étroite avec le barasingha.

La classification la plus acceptée aujourd’hui le situe fermement au sein de Rucervus, en tant qu’espèce distincte, témoignant d’une lignée particulière adaptée aux plaines humides de Thaïlande. Bien que disparu, son nom scientifique reste valide et reconnu par les grandes bases taxonomiques internationales. L’histoire taxonomique de ce cervidé rappelle aussi le rôle crucial des naturalistes du XIXe siècle dans la découverte et la description d’espèces aujourd’hui disparues, offrant un témoignage scientifique indispensable sur une faune que l’activité humaine a fait disparaître en un temps très court.


CLASSIFICATION


Fiche d'identité
Nom communCerf de Schomburgk
English nameSchomburgk's deer
Español nombreCiervo de Schomburgk
RègneAnimalia
EmbranchementChordata
Sous-embranchementVertebrata
Super-classeTetrapoda
ClasseMammalia
Sous-classeTheria
Infra-classeEutheria
OrdreArtiodactyla
Sous-ordreRuminantia
FamilleCervidae
Sous-familleCervinae
GenreRucervus
Nom binominalRucervus schomburgki
Décrit parEdward Blyth
Date1863



Satut IUCN

Espèce éteinte (EX)

SOURCES

* Liens internes

Liste Rouge IUCN des espèces menacées

Mammal Species of the World (MSW)

Système d'information taxonomique intégré (ITIS)

Ultimate Ungulate

* Liens externes

Global Biodiversity Information Facility (GBIF)

The Sixth Extinction

Wikimedia Commons

* Bibliographie

Blyth, E. (1863). Description of a new species of deer from Siam. Proceedings of the Zoological Society of London, 1863: 187–188.

Grubb, P. (1990). Rucervus schomburgki. In: IUCN Red List of Threatened Species.

Groves, C. P. & Grubb, P. (2011). Ungulate Taxonomy. Baltimore: Johns Hopkins University Press.

Geist, V. (1998). Deer of the World: Their Evolution, Behaviour, and Ecology. Stackpole Books.

McNeely, J. A. (1978). The Schomburgk’s deer: a case study of extinction. Biological Conservation, 14(1): 51–63.

Heude, P. M. (1888). Etudes sur les Cervidés de l’Indochine. Mémoires concernant l’histoire naturelle de l’Empire chinois, série zoologique.

Nowak, R. M. (1999). Walker’s Mammals of the World. 6th Edition. Johns Hopkins University Press.

Leslie, D. M. (2011). Rucervus duvaucelii (Artiodactyla: Cervidae). Mammalian Species, 43(874): 1–30.

Harrington, R. (1979). Ecological and behavioural study of barasingha and implications for the extinct Schomburgk’s deer. Journal of Bombay Natural History Society, 76: 301–315.