Le genre Arabitragus regroupe un bovidé méconnu mais remarquable, le Tahr d’Arabie (Arabitragus jayakari). Endémique de la péninsule arabique, ce mammifère habite les montagnes escarpées du sultanat d’Oman, où il s’est adapté à un environnement aride et rocailleux. Longtemps confondu avec ses cousins asiatiques du genre Hemitragus, Arabitragus a été reconnu comme distinct au début du XXIe siècle grâce aux avancées en génétique moléculaire et en morphologie comparée. Ce genre monospécifique est d’un grand intérêt pour la biogéographie et la conservation, car il illustre l’histoire évolutive isolée d’un ruminant dans un contexte écologique extrême.
Le genre Arabitragus est monospécifique, ce qui signifie qu’il ne comprend qu’une seule espèce reconnue : le Tahr d’Arabie (Arabitragus jayakari). Ce taxon, endémique des monts Hajar d’Oman, est adapté à la vie en milieux rocheux et semi-désertiques. L'espèce présente des caractéristiques morphologiques et écologiques qui le distinguent nettement de ses anciens congénères du genre Hemitragus. De taille moyenne, avec un pelage brun grisâtre et une barbe courte, il possède des cornes courbées vers l’arrière chez les deux sexes, bien que plus marquées chez le mâle. Actif surtout à l’aube et au crépuscule, ce caprin évite les hautes températures en se réfugiant dans les zones ombragées et escarpées. Malgré son adaptation au climat rigoureux, la fragmentation de son habitat, due aux activités humaines et au pâturage par les chèvres domestiques, représente une menace majeure. Sa distribution limitée et sa faible densité en font une priorité de conservation pour les autorités omanaises et les biologistes de la région.
TAXONOMIE
L’espèce Arabitragus jayakari a été initialement décrite en 1894 par le zoologiste britannique Michael Rogers Oldfield Thomas sous le nom de Hemitragus jayakari, en l’honneur du médecin et naturaliste A.S.G. Jayakar, qui avait collecté les premiers spécimens dans les monts Hajar. Pendant plus d’un siècle, l’animal fut classé dans le genre Hemitragus, aux côtés du jharal (Hemitragus jemlahicus) et du Thar du Nilgiri (Nilgiritragus hylocrius, anciennement Hemitragus hylocrius). Cependant, des études morphologiques et moléculaires entreprises à partir des années 1990 ont progressivement mis en lumière les différences génétiques et structurelles significatives entre ces espèces.
C’est en 2005 que la révision taxonomique majeure est intervenue. Sur la base de travaux de phylogénie moléculaire (Ropiquet & Hassanin, 2005), il a été établi que les tahrs ne forment pas un groupe monophylétique. En conséquence, l’espèce d’Arabie a été placée dans un genre distinct, Arabitragus, reflétant son isolement évolutif et géographique. Ce nouveau genre fut officiellement proposé par Ropiquet et Hassanin la même année. Arabitragus jayakari s’avère plus proche des caprins de type rupicole que de ses anciens congénères, justifiant sa reclassification. Cette séparation taxonomique a aussi des implications en conservation, en soulignant l’unicité génétique de l’espèce.
Ropiquet, A., & Hassanin, A. (2005). Molecular evidence for the polyphyly of the genus Hemitragus (Mammalia, Bovidae). Molecular Phylogenetics and Evolution, 36(1),1 154-168.
Ross, S. G., et al. (2017). Habitat use and conservation of the Arabian tahr Arabitragus jayakari in the Hajar Mountains of Oman. Oryx, 51(1), 139-146.
Wilson, D. E., & Mittermeier, R. A. (Eds.). (2011). Handbook of the Mammals of the World - Volume 2 - Hoofed Mammals. Lynx Edicions.
Groves, C. & Grubb, P. (2011). Ungulate Taxonomy. Johns Hopkins University Press.
Shackleton, D.M. (1997). Wild Sheep and Goats and Their Relatives: Status Survey and Conservation Action Plan for Caprinae. IUCN.