Le loup de Honshū (Canis lupus hodophilax) était une sous-espèce de loup gris originaire des îles de Honshū, Shikoku et Kyūshū au Japon. Ce canidé de petite taille est devenu un sujet d'intérêt particulier en raison de son extinction relativement récente et de son statut unique dans la culture japonaise. Son histoire taxonomique est également complexe, ayant été initialement classé comme une espèce distincte avant d'être reclassé comme une sous-espèce du loup gris. Son extinction est principalement attribuée à la perte d'habitat, à la persécution humaine et aux maladies importées. Le loup de Honshū est également connu sous le nom de loup du Japon.
Loup de Honshū (Canis lupus hodophilax) Source: The Japan Times
Le loup de Honshū était notablement plus petit que la plupart des autres sous-espèces de loup gris. Sa taille, son poids et ses caractéristiques physiques spécifiques variaient légèrement, mais il était généralement décrit comme ayant un corps élancé, des pattes relativement courtes et une queue touffue.
Son pelage était de couleur gris-brun avec des nuances plus claires sur le ventre et les pattes. Les oreilles étaient relativement petites et triangulaires, et le museau était pointu. Cette petite taille était probablement une adaptation à son environnement insulaire et à la disponibilité de proies plus petites. Des études ostéologiques de spécimens préservés ont permis de confirmer ces caractéristiques morphologiques, distinguant clairement le loup de Honshū des grands loups continentaux.
Historiquement, le loup de Honshū était endémique des îles japonaises de Honshū, Shikoku et Kyūshū. Son aire de répartition couvrait une grande partie des régions montagneuses et forestières de ces îles. Il était un prédateur clé dans les écosystèmes forestiers japonais. La densité de sa population variait en fonction de la disponibilité des proies et de la topographie. Des preuves historiques et des récits folkloriques indiquent sa présence dans diverses préfectures, du nord au sud des îles principales. Cependant, à mesure que l'activité humaine s'intensifiait, son habitat s'est fragmenté et réduit, ce qui a directement affecté sa répartition.
L'alimentation du loup de Honshū était principalement composée de mammifères présents dans son habitat insulaire. Les cerfs sika (Cervus nippon) constituaient une source de nourriture majeure, mais il chassait également des sangliers (Sus scrofa) et d'autres petits mammifères comme les lièvres et les rongeurs. Des études de contenus stomacaux de spécimens et des analyses de fèces ont permis de confirmer ces préférences alimentaires.
La disponibilité de ces proies variait saisonnièrement, influençant les stratégies de chasse du loup. En période de disette, il pouvait également se tourner vers des carcasses ou des sources de nourriture moins conventionnelles. Son régime alimentaire reflétait l'écosystème unique des îles japonaises, où il occupait le sommet de la chaîne alimentaire en tant que prédateur de grands herbivores.
L'extinction du loup de Honshū est survenue au début du XXe siècle, le dernier spécimen confirmé ayant été abattu en 1905 dans la préfecture de Nara. Plusieurs facteurs ont contribué à sa disparition. La déforestation et l'expansion agricole ont entraîné une perte massive de son habitat naturel. De plus, le loup a été activement chassé et empoisonné par les agriculteurs et le gouvernement, qui le considéraient comme une menace pour le bétail et une nuisance. L'introduction de la rage et d'autres maladies par les chiens domestiques a également décimé les populations restantes, déjà affaiblies. La combinaison de la persécution directe, de la perte d'habitat et des maladies s'est avérée fatale pour cette sous-espèce.
Le loup de Honshū est actuellement classé comme éteint (EX) par l'Union internationale pour la conservation de la nature (IUCN). Malgré des rapports occasionnels de sightings non confirmés, il n'y a aucune preuve scientifique de sa survie. Des efforts de recherche, y compris des analyses ADN de spécimens de musée, ont été menés pour mieux comprendre son histoire génétique et sa relation avec d'autres populations de loups. Son extinction est un rappel poignant de l'impact humain sur la biodiversité et de la vulnérabilité des espèces insulaires. Des initiatives sont en cours au Japon pour la conservation d'autres espèces menacées et la restauration des habitats naturels, en partie inspirées par la perte de cette icône de la faune japonaise.
L'histoire taxonomique du loup de Honshū est particulièrement intéressante en raison de sa petite taille et de son isolement géographique, qui ont conduit à des débats prolongés sur son statut au sein du genre Canis. Il a été décrit pour la première fois scientifiquement en 1839 par le zoologiste néerlandais Coenraad Jacob Temminck, qui lui a attribué le nom d'espèce distinct Canis hodophilax. Ce nom, signifiant "garde-chemin" ou "protecteur de la route", fait probablement référence à son rôle mythologique dans le folklore japonais comme gardien des voyageurs. Temminck a justifié cette classification spécifique en se basant sur ses caractéristiques morphologiques uniques, notamment sa taille significativement plus petite par rapport aux autres loups continentaux, ses membres courts et son crâne distinct.
Pendant une longue période, le consensus scientifique a maintenu Canis hodophilax comme une espèce à part entière. Cependant, au fur et à mesure que les techniques d'analyse évoluaient, notamment avec l'avènement de la génétique moléculaire, de nouvelles perspectives ont émergé. Dans les années 1990 et 2000, des études morphométriques plus détaillées, comparant les squelettes du loup de Honshū avec ceux d'autres sous-espèces de loups gris, ainsi que des analyses phylogénétiques basées sur l'ADN mitochondrial, ont commencé à remettre en question ce statut d'espèce distincte.
Ces recherches ont révélé que, bien que le loup de Honshū présentait des adaptations morphologiques distinctes dues à son environnement insulaire et à un possible phénomène de nanisme insulaire, sa divergence génétique par rapport au loup gris continental (Canis lupus) n'était pas suffisante pour justifier une classification au niveau de l'espèce. Les études génétiques ont montré une étroite parenté avec les populations de loup gris d'Asie continentale, suggérant une origine commune et une séparation relativement récente. En conséquence, le loup de Honshū a été reclassé comme une sous-espèces, recevant le nom trinomial Canis lupus hodophilax. Cette révision taxonomique souligne l'importance des outils génétiques dans la compréhension des relations évolutives et la classification des espèces, en complément des observations morphologiques traditionnelles.
En anglais, le loup de Honshu est appelé Honshu wolf Source: Arkive
DANS LA CULTURE
Le loup de Honshū, ou "okami" en japonais, occupait une place complexe et souvent ambivalente dans la culture japonaise avant son extinction. Longtemps vénéré comme une divinité protectrice et bienveillante, il était perçu comme le messager des dieux des montagnes, les "yama no kami", et était associé à la fertilité des récoltes et à la protection des agriculteurs contre les cervidés et les sangliers. Des sanctuaires Shinto dédiés au loup, comme celui de Mitsumine dans la préfecture de Saitama, témoignent de cette vénération. Des amulettes et des talismans représentant le loup étaient également utilisés pour éloigner les incendies et les maladies, et pour assurer la prospérité.
Cependant, cette image positive a commencé à se dégrader avec l'introduction de l'élevage de bétail à grande échelle et la propagation de la rage. Le loup est alors devenu une menace pour le bétail et un vecteur de maladie, transformant sa perception en celle d'une bête féroce et nuisible. Le gouvernement de Meiji, influencé par les méthodes occidentales, a mis en place des campagnes d'extermination à grande échelle, offrant des primes pour chaque loup abattu. Cette politique a contribué de manière significative à son extinction.
Malgré son absence physique, le loup de Honshū continue de vivre dans le folklore, la littérature et l'art japonais. Il est souvent représenté dans les contes populaires comme une créature sage et parfois malicieuse, mais toujours dotée d'une aura mystique. Des expressions japonaises et des légendes locales rappellent son ancienne présence. Plus récemment, l'extinction du loup de Honshū est devenue un symbole poignant de la perte de la biodiversité et de la nécessité de préserver la nature. Il est aujourd'hui souvent évoqué dans les débats sur la conservation et la réintroduction d'espèces, servant de rappel de l'équilibre délicat entre l'homme et la nature.
Le loup du Japon (Okami) dans la culture japonaise Source: Institut des Traditions du Japon
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